Sous l’égide de l’Égypte et des États-Unis, des négociations cruciales se tiennent au Caire entre représentants israéliens et émissaires du Hamas. Objectif immédiat : la libération des otages. Mais derrière cette première étape se joue une bataille politique beaucoup plus large, celle du plan de paix imposé par Donald Trump.
Le Caire est une nouvelle fois au centre du jeu diplomatique. Ce lundi 6 octobre, les principaux acteurs du conflit israélo-palestinien se sont retrouvés dans la capitale égyptienne pour tenter d’amorcer un accord. Sous l’impulsion directe de Donald Trump, redevenu incontournable dans la région, les discussions portent d’abord sur la libération des 48 otages israéliens encore détenus à Gaza et l’échange avec près de 2 000 prisonniers palestiniens.
Mais au-delà de ce premier objectif humanitaire, ces pourparlers s’inscrivent dans une séquence politique à très haut risque. Car Washington pousse déjà pour une deuxième phase : un cessez-le-feu global et la mise en œuvre d’un “plan de paix en 20 points” censé mettre fin, définitivement, à la guerre entre Israël et le Hamas.
Le forcing de Donald Trump
D’après The Economist, le président américain mène ces discussions “avec un sens aigu du spectacle et de l’urgence”. Son gendre Jared Kushner et son conseiller Steve Witkoff, envoyés spéciaux au Moyen-Orient, ont été dépêchés en Égypte pour “chaperonner” les négociateurs israéliens et palestiniens.
Trump a exigé de Benyamin Netanyahou qu’il “mette fin au conflit” et accepte les termes d’un accord de cessez-le-feu, tout en menaçant le Hamas “d’anéantissement” s’il refusait de coopérer. “Je suis convaincu qu’ils sont prêts pour la PAIX”, a-t-il affirmé sur son réseau Truth Social, réitérant son ambition d’obtenir le prix Nobel de la paix, décerné ce 10 octobre.
Un accord sous tension
Les discussions actuelles s’articulent autour d’un casse-tête : le séquençage du cessez-le-feu. Israël refuse de retirer ses troupes de Gaza tant que le Hamas ne dépose pas les armes, tandis que le mouvement islamiste exige des garanties que Tsahal ne reprendra pas les combats une fois les otages libérés.
Selon plusieurs diplomates cités par The Economist, un compromis partiel est en cours de négociation : un retrait progressif des forces israéliennes, encadré par des garanties américaines et égyptiennes, en échange de la libération des captifs. Si cette première phase aboutit, l’aide humanitaire internationale pourrait affluer massivement vers Gaza, marquant une trêve symbolique après deux années de guerre.
Le dilemme du Hamas
Pour le Hamas, ces pourparlers représentent une épreuve existentielle. Son négociateur en chef, Khalil Al-Hayya, a survécu de peu à une frappe israélienne à Doha il y a un mois, qui a coûté la vie à son fils et à plusieurs proches collaborateurs. Tiraillé entre sa branche militaire et son aile politique, le mouvement islamiste est divisé : une partie veut conserver le contrôle de Gaza, tandis qu’une autre serait prête à accepter un gouvernement “technocratique”sous supervision internationale.
Mais céder sur le désarmement ou sur le pouvoir reviendrait à se marginaliser face au Fatah, le grand rival palestinien soutenu par les Occidentaux. “Refuser totalement le plan de paix serait le signe d’une radicalisation définitive du Hamas”, analyse le magazine britannique.
Netanyahou, entre pression américaine et calcul électoral
De son côté, Benyamin Netanyahou tente désormais de présenter l’initiative américaine comme une victoire personnelle. “De victoire en victoire, nous changeons le visage du Moyen-Orient”, a-t-il déclaré dans un communiqué.
Mais l’équilibre politique interne est précaire : les partis d’extrême droite israéliens menacent de quitter la coalition si le plan aboutit sans destruction totale du Hamas. Si ces ministres se retirent du gouvernement, Netanyahou pourrait être contraint de convoquer des élections anticipées, un an avant la date prévue, alors que 72 % des Israéliens soutiennent le plan Trump selon les derniers sondages.
Un tournant historique en suspens
L’armée israélienne, épuisée par deux ans de guerre, se dit prête à se retirer “là où on lui dira de le faire”. De son côté, la population gazaouie, exsangue, attend un répit humanitaire. Mais les obstacles restent immenses : le désarmement du Hamas, la formation d’une force internationale de stabilisation, et la question du statut futur de Gaza divisent encore profondément les protagonistes.
Si un accord est trouvé au Caire, il pourrait redessiner durablement les équilibres au Moyen-Orient. Mais l’échec de ces pourparlers risquerait au contraire de précipiter le Hamas et le gouvernement Netanyahou dans une crise interne, et de ruiner les ambitions diplomatiques de Donald Trump à l’aube du Nobel.Sources :
The Economist – “Decisive talks in Cairo for the future of Hamas and Netanyahu” – 7 octobre 2025 – https://www.economist.com
Courrier international – “Au Caire, des négociations décisives pour l’avenir du Hamas et de Nétanyahou” – 7 octobre 2025 – https://www.courrierinternational.com