L’Italie pourrait réaliser un vieux rêve d’ingénierie tout en respectant ses engagements envers l’Otan. Rome envisage en effet de classer la construction d’un pont reliant la Sicile au reste de la péninsule comme une dépense militaire, afin d’atteindre l’objectif fixé fin juin par l’alliance : consacrer 5 % de son PIB à la défense d’ici 2035.
Réunis à La Haye, les 32 pays membres de l’Otan – à l’exception de l’Espagne – se sont engagés à porter leur budget de défense à 5 % du PIB. Une barre très haute, alors que neuf États n’atteignent toujours pas les 2 % requis précédemment.
Cependant, l’accord laisse la porte ouverte à une définition large des dépenses militaires : 1,5 % pourra être consacré à la protection des infrastructures critiques et au renforcement de la base industrielle de défense. Une marge dont l’Italie entend bien profiter.
Le pont de Messine, un projet stratégique sous étiquette Otan
Le gouvernement italien envisage ainsi de classer la construction du pont au-dessus du détroit de Messine comme un projet relevant de la défense nationale. Un projet vieux de plusieurs décennies, souvent annoncé puis abandonné pour raisons budgétaires.
En avril dernier, le Conseil des ministres a déclaré que le pont devait être érigé pour des « raisons impératives d’intérêt public majeur », soulignant son importance stratégique : faciliter les déplacements des forces armées italiennes et des alliés de l’Otan, la Sicile étant qualifiée de plateforme de l’alliance.
Antonio Tajani assume cette approche
Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a confirmé cette perspective. Interrogé par Milano Finanza, il a déclaré : « Pour atteindre l’objectif de 5 %, on se concentrera sur les infrastructures à usage civil et militaire, comme le pont sur le détroit de Messine, qui entre dans le concept de défense. »
Un responsable du Trésor italien, cité anonymement par Politico, explique que qualifier le pont de projet militaire permettrait de lever des fonds plus facilement et d’éviter certains litiges juridiques avec les autorités locales.
Un projet toujours jugé utopique par les Italiens
Malgré cette stratégie, la majorité des Italiens restent sceptiques quant à la réalisation effective du pont, tant les promesses se sont succédé sans suite depuis des décennies et que plane l’ombre de la mafia. Mais si Rome parvient à concrétiser ce chantier sous étiquette Otan, d’autres pays membres pourraient être tentés de recourir à la même « astuce comptable » pour atteindre les 5 % souhaités par Donald Trump.
Source : Courrier international.