Jeudi 23 octobre, deux avions russes ont pénétré brièvement dans l’espace aérien lituanien, avant de rebrousser chemin. L’incident, le dernier d’une série dans la région, ravive les tensions entre Moscou et l’Otan. Tandis que la Lituanie parle de “provocation”, le Kremlin nie toute violation.
Une nouvelle alerte dans le ciel balte. Deux avions militaires russes — un chasseur Su-30 et un avion ravitailleur Il-78 — ont franchi, jeudi 23 octobre, la frontière aérienne de la Lituanie sur environ 700 mètres, au niveau de la ville de Kybartai, non loin de Kaliningrad. L’incursion, qui a duré moins de vingt secondes, a aussitôt déclenché une réaction de l’armée de l’air lituanienne et de ses alliés de l’Otan.
Selon le média local Delfi, deux Eurofighter espagnols déployés dans le cadre de la mission de police du ciel de l’Alliance ont été envoyés sur place. La Première ministre lituanienne, Inga Ruginiene, a salué “la réaction rapide et coordonnée” des forces baltes et alliées, tout en condamnant une “provocation délibérée”. “La Lituanie ne tolérera pas que Moscou joue avec les limites de notre souveraineté. Ce comportement d’un autre temps confirme que la Russie agit comme un État terroriste”, a-t-elle écrit sur Facebook.
Le Kremlin, lui, nie catégoriquement. Dans un communiqué diffusé par le ministère russe de la Défense et relayé par le média pro-gouvernemental Vzgliad, Moscou affirme que “les avions n’ont pas dévié de leur trajectoire” et que les vols “se sont déroulés dans le strict respect des règles internationales”. Une version immédiatement contestée par Vilnius, qui a adressé une note diplomatique de protestation à l’ambassade de Russie.
L’incident n’est pas isolé. Depuis le début de l’automne, la région baltique fait face à une multiplication des incursions russes, souvent brèves mais symboliquement lourdes. En septembre, un Mig-31 avait violé l’espace aérien estonien pendant douze minutes. En Pologne, dix-neuf drones russes ont franchi la frontière aérienne en un mois, selon la Deutsche Welle.
Pour LRT, la télévision publique lituanienne, “ces provocations s’inscrivent dans la stratégie du Kremlin consistant à tester la réactivité de l’Otan”. Une tactique dite de la “zone grise”, qui vise à entretenir un climat d’instabilité sans franchir ouvertement le seuil de la confrontation militaire.
Les réactions politiques à Vilnius sont partagées. Le président de la commission de la sécurité nationale, Rimantas Sinkevicius, a évoqué “une erreur de navigation probable”. Mais son vice-président, Laurynas Kasciunas, ancien ministre de la Défense, estime qu’il s’agit d’un acte “calculé pour jauger la réponse de l’Otan”.
Ce nouvel épisode intervient alors que les tensions régionales demeurent vives. Kaliningrad, enclave russe enclavée entre la Lituanie et la Pologne, est devenue un foyer de manœuvres militaires et d’espionnage depuis l’invasion de l’Ukraine en 2022. Pour The Economist, “les incursions aériennes russes en Europe de l’Est font partie d’une guerre d’usure psychologique contre les pays de l’Otan”.
À Bruxelles, l’Otan a rappelé que toute violation de l’espace aérien d’un État membre constitue “un acte grave”, tout en appelant à la désescalade. Mais dans les capitales baltes, la patience s’amenuise. “Chaque incident nous rapproche un peu plus de la ligne rouge”, prévient un diplomate lituanien cité par Politico Europe.
Sources :
Courrier International – « Deux avions russes dans l’espace aérien lituanien : Moscou met encore l’Occident à l’épreuve » – 24 octobre 2025 – lien
Delfi (LT) – « Lithuanian Air Force detects Russian aircraft incursion near Kybartai » – 24 octobre 2025 – lien
LRT – « Lithuanian PM calls Russian airspace breach a provocation » – 24 octobre 2025 – lien
Deutsche Welle – « Baltic airspace violations: Russia tests NATO’s limits » – 23 octobre 2025 – lien
Vzgliad – « Russia denies airspace violation over Lithuania » – 24 octobre 2025 – lien
