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Ahmed Toufiq. Photo : @Wikipedia

Maroc : Laïcité ou sécularisation ? Les propos du ministre des Affaires islamiques suscitent le débat

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Les déclarations d’Ahmed Toufiq, ministre des Habous et des Affaires islamiques du Maroc, faites en octobre dernier lors d’une rencontre avec le ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau, continuent de faire des vagues. En suggérant que le Maroc aurait adopté une approche de gestion religieuse similaire à la laïcité, le ministre a lancé un débat passionné dans un pays où la religion est au cœur de l’identité nationale

 « Nous sommes laïcs nous aussi… Mais nous n’avons pas vos textes de 1905 », avait déclaré, Ahmed Toufiq, lors de cette rencontre. Cette comparaison audacieuse, rendue publique fin novembre, a provoqué une réflexion nationale sur la définition et l’application de la laïcité dans le contexte marocain.

Le média TelQuel se demande par exemple si “Le Maroc peut-il réellement être qualifié de pays laïc ?”.

Au Maroc, le roi Mohammed VI détient le titre de commandeur des croyants, ce qui en fait le garant de l’islam et du libre exercice des cultes, selon la Constitution. Cette singularité institutionnelle contraste avec les principes de séparation entre État et religion tels qu’appliqués en France.

Un islam tolérant et modéré comme modèle

Depuis, l’islamologue Asma Lamrabet a relativisé l’idée de laïcité au Maroc. Elle a mis en avant un modèle spécifique fondé sur des réformes visant à promouvoir un islam marocain tolérant et modéré. Pour elle, le terme “laïcité” peut prêter à confusion, mais le modèle marocain, bien que différent, est selon elle, tout aussi légitime.

De son côté, le politologue Abdellah Tourabi estime que le concept de sécularisation est plus adapté au Maroc, rappelant que le droit marocain repose principalement sur des législations humaines. Selon lui, le roi intervient en tant que commandeur des croyants uniquement dans les affaires strictement religieuses, conformément à la Constitution.

Réactions politiques et tensions

Les propos d’Ahmed Toufiq n’ont pas seulement interpellé les intellectuels, mais ont aussi déclenché des réactions dans la sphère politique. Abdelilah Benkirane, ancien chef de gouvernement et actuel secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), a vivement réagi, déclarant que le Maroc est un « État islamique et non laïc. »

Un échange de lettres entre le ministre et Benkirane a suivi, ce dernier accusant des tiers d’exploiter ces déclarations à des “mauvaises fins”. Ahmed Toufiq a tenu à clarifier ses propos, soulignant qu’il ne qualifiait pas le Maroc d’État laïc, mais souhaitait plutôt mettre en lumière la liberté religieuse dont jouissent ses citoyens.

Qui est Ahmed Taoufiq ?

Ahmed Taoufiq, reconduit comme ministre des Habous et des Affaires Islamiques depuis 2002, a été vice-doyen de la Faculté des lettres de Rabat où il est professeur d’Histoire. Il a ensuite été nommé directeur de l’Institut des études africaines, puis directeur de la Bibliothèque générale. Celui qui a fait sa thèse sur la société marocaine au XIXe siècle est l’auteur de plusieurs études historiques portant sur les rapports entre Islam et développement, les juifs de Demnate ou le Maroc et l’Afrique occidentale à travers les âges. Il a aussi contribué à l’Encyclopédie du Maroc. Nommé président de la Fondation de la mosquée Hassan II en 2010, il est également romancier, connu pour ses œuvres comme Les voisines d’Abi Moussa et Assayl.

Sources : Courrier International, TelQuel, Le Matin

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