L’agression du rabbin d’Orléans, survenue samedi 23 mars en pleine rue, a suscité une vague d’indignation à travers la France. Alors que le suspect, un adolescent aux identités multiples a été interpellé, les appels à l’unité face à l’antisémitisme se sont multipliés.

Samedi, vers 13h30, le rabbin Arié Engelberg rentrait chez lui avec son fils de neuf ans lorsqu’il a été attaqué dans une rue d’Orléans. Un jeune homme l’a suivi, s’est filmé en mode selfie tout en proférant des insultes antisémites, avant de s’en prendre physiquement à lui.

Le témoignage d’Arié Engelb

« Il m’a mordu dans le dos pendant que je le retenais contre un volet », a-t-il raconté sur BFMTV.

L’agresseur, selon Engelberg, aurait lancé à plusieurs reprises : « Les Juifs sont des fils de… », tout en crachant à terre, dans une scène filmée qui a profondément choqué.

Le rabbin a insisté sur la solidarité spontanée de témoins. Des passants, un commerçant, puis deux jeunes musulmans maghrébins sont intervenus. « Ils ont dit : Ce n’est pas l’islam, ce n’est pas nous. Ce sont eux qui ont appelé la police. »

Engelberg a aussi salué le professionnalisme des forces de l’ordre, intervenues rapidement et avec respect des règles du Shabbat. Il souligne enfin la bienveillance des habitants d’Orléans, malgré ce qu’il qualifie d’« agression annoncée »: « En tant que rabbin, je savais que cela arriverait un jour. » Il a expliqué avoir toute de suite compris que cette personne qui ne semblait pas d’Orléans allait l’agresser. « À son regard, j’ai tout de suite su qu’il n’était pas d’ici. »

Le rabbin affirme vouloir rester à son poste : « Je continuerai à faire en sorte qu’un juif puisse vivre son judaïsme avec fierté, où qu’il soit. »

Un adolescent interpellé, plusieurs identités

Dans la soirée, un adolescent de 16 ans a été interpellé. Identifié par la victime, il serait inconnu des services de renseignement, mais enregistré sous trois identités différentes – une marocaine, deux palestiniennes. Il aurait fui un centre pour mineurs à Marseille. Son profil interroge : son identité exacte reste à confirmer.

La procureure d’Orléans, Emmanuelle Bochenek-Puren, a précisé que l’enquête a été ouverte pour « violences volontaires en raison de l’appartenance réelle ou supposée de la victime à une religion ».

Haïm Korsia : « Défendre la République »

Sur BFMTV, le grand rabbin de France Haïm Korsia a salué la force morale d’Arié Engelberg, tout en dénonçant la banalisation des insultes antisémites. « Intérioriser l’idée que des insultes sont acceptables est inacceptable. »

Il a rendu hommage aux témoins qui se sont interposés : « Il n’y a pas eu de silence complice. » Pour Korsia, la seule réponse possible est la détermination absolue à défendre les principes de la République. Citant Pierre Birnbaum, il rappelle que « les Juifs sont les fous de la République ».

Joann Sfar : « Rester en France est un combat »

L’auteur Joann Sfar a également pris la parole sur BFMTV : « Je ne connais pas une seule famille juive qui n’ait subi une agression depuis deux ans. ».

Sfar a mis en garde contre ce qu’il appelle « l’antisémitisme vertueux » : la tendance à justifier les actes hostiles contre les Juifs par des opinions supposées sur le conflit israélo-palestinien. Il déplore une pression sociale croissante, poussant les jeunes juifs à cacher leurs identités ou à dissimuler leur lien avec Israël.

Une mobilisation politique et citoyenne

Le président de la communauté israélite d’Orléans, André Druon, a rappelé que la ville était jusque-là préservée. « Depuis le 7 octobre, aucun incident notable, sauf quelques graffitis. Là, c’est un basculement. »

Le maire LR d’Orléans Serge Grouard s’est rendu à la synagogue. Le contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Emmanuel Macron a dénoncé « le poison de l’antisémitisme », s’engageant à ne céder « ni au silence ni à l’inaction ». 

Jordan Bardella (RN) a évoqué « une fièvre antisémite alimentée par l’extrême gauche », tandis que Manuel Bompard (LFI) a qualifié l’agression d’« insupportable », appelant à « l’unité contre tous les racismes ». Gérald Darmanin a accusé La France Insoumise d’entretenir une « ambiguïté mortifère ».

Rassemblements en soutien

À Paris, l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) et l’Union des lycéens juifs de France ont appelé à un rassemblement dimanche soir place de la Bastille. À Orléans, une marche silencieuse est prévue mardi à 18h, à l’appel des associations juives locales.