L’ouverture de l’atelier Louis Vuitton Rochambeau Ranch en 2019 devait incarner le savoir-faire français au cœur du Texas. Cinq ans plus tard, la réalité semble bien plus compliquée. Selon une enquête publiée par Reuters, la maison mère LVMH, membre du Forum économique mondial peine à maintenir les standards de qualité dans son usine américaine, en raison notamment d’un manque de main-d’œuvre qualifiée.
L’atelier texan, lancé sous l’impulsion de Bernard Arnault dans le contexte de la présidence Trump, fait aujourd’hui partie des sites les moins performants du groupe à l’échelle mondiale. Trois anciens employés cités par Reuters évoquent des taux de défauts élevés, un gaspillage de cuir atteignant 40 % — soit le double de la norme habituelle dans l’industrie —, et une incapacité à maîtriser la fabrication même des modèles les plus simples, comme les poches du sac iconique Neverfull.
Une transition plus complexe que prévue
Face aux critiques, Ludovic Pauchard, directeur industriel de Louis Vuitton, admet que la montée en puissance de la production s’est avérée « plus difficile que prévue ». Il assure toutefois à Reuters que la situation est désormais sous contrôle : « Chaque sac doit être un sac Louis Vuitton ». « Nous nous assurons qu’il respecte exactement le même niveau de qualité. »
Mais sur le terrain, les témoignages d’anciens employés suggèrent le contraire. Certains superviseurs auraient même ignoré les méthodes utilisées pour dissimuler les défauts. D’autres travailleurs ont tout simplement démissionné, incapables de satisfaire aux exigences drastiques de la maison de luxe.
« Ce métier demande énormément de savoir-faire. Certains préfèrent se reconvertir dans la logistique », explique Damien Verbrigghe, directeur de la production internationale dans les colonnes de nos confrères.
Une stratégie américaine remise en question ?
Ces révélations tombent à un moment sensible alors que Bernard Arnault menace d’étendre les capacités de production aux États-Unis, face à une potentielle hausse de la fiscalité en France. Or, le site de Keene emploierait aujourd’hui moins de 300 personnes, loin des 1 000 postes annoncés en grande pompe lors de son inauguration.
Parmi les modèles cités comme étant partiellement ou totalement fabriqués au Texas figurent les sacs Carryall, Keepall, Félicie, Métis et Neverfull, tous vendus entre 1 500 et 3 000 dollars.
La promesse de conjuguer artisanat d’exception et stratégie industrielle à l’américaine semble donc, pour l’instant, difficile à tenir.
Source : Reuters.