L’économie allemande s’enlise. Le pays, pilier industriel de l’Europe, connaît un déclin prolongé que les experts jugent désormais « dramatique ». La stagnation touche la classe moyenne et commence à peser sur la Suisse, son principal partenaire commercial.
Rien ne va plus dans la première économie d’Europe. Selon l’institut de recherche Ifo, l’Allemagne est entrée dans une phase de déclin structurel qui affecte de plus en plus le quotidien de ses citoyens. Dans une interview au quotidien Bild, Clemens Fuest, président de l’institut, tire la sonnette d’alarme : « Des millions d’Allemands constatent déjà une baisse de leur niveau de vie. L’Allemagne se trouve depuis des années dans une situation de déclin économique. La situation est désormais dramatique. »
Les chiffres publiés en octobre par l’Ifo sont sans équivoque : le produit intérieur brut stagne depuis 2018, tandis que le chômage a atteint en août son plus haut niveau depuis dix ans. Malgré une consommation en hausse de 25 % depuis 2015, les investissements des entreprises s’effondrent. Une évolution préoccupante pour un pays dont la prospérité repose historiquement sur la puissance de son industrie et de son exportation.
« Moins d’investissements signifie moins de croissance, moins de recettes fiscales, et donc moins de moyens pour financer les services publics », explique Clemens Fuest. Ce cercle vicieux, enclenché depuis plusieurs années, mine désormais la confiance de la classe moyenne, confrontée à une érosion du pouvoir d’achat, à la hausse des coûts de l’énergie et à un ralentissement du marché du logement.
L’effet domino sur la Suisse
Cette crise allemande ne s’arrête pas aux frontières. Pour la Suisse, dont l’économie est étroitement liée à celle de son voisin, les répercussions se font déjà sentir. Les exportations suisses vers l’Allemagne ont reculé depuis 2023, et les investissements des entreprises helvétiques de l’autre côté du Rhin diminuent à leur tour.
« Lorsque l’Allemagne ralentit, la Suisse tousse », résume un économiste zurichois. L’Allemagne reste le premier partenaire commercial de la Confédération, représentant près de 20 % de ses échanges extérieurs. Or, la baisse de la demande allemande touche directement l’industrie horlogère, pharmaceutique et mécanique suisse, piliers de son économie exportatrice.
Les réformes exigées par les économistes
Pour enrayer cette spirale, Clemens Fuest appelle le gouvernement du chancelier Friedrich Merz à agir vite et fort. Il demande la présentation, d’ici au printemps 2026, d’un plan de réforme global. Parmi ses propositions :
– Réduire la “pension des mères”, un dispositif coûteux qui permet aux femmes de faire valoir leurs années d’éducation d’enfants dans le calcul de la retraite.
– Alléger la bureaucratie qui pèse sur les entreprises et freine l’investissement.
– Stimuler la productivité par la numérisation, la simplification administrative et la relance de l’innovation industrielle.
À quelques jours de la publication, par l’Office fédéral de la statistique allemand, des chiffres de conjoncture du troisième trimestre, les prévisions demeurent sombres. L’Ifo anticipe une stagnation persistante, signe que la locomotive européenne pourrait bien rester à l’arrêt encore plusieurs trimestres.
Pour l’Allemagne comme pour la Suisse, cette panne de moteur est bien plus qu’une crise passagère : elle questionne la durabilité du modèle économique européen fondé sur l’industrie exportatrice et la stabilité budgétaire.
Sources :
Bild – Clemens Fuest : “L’Allemagne est en déclin économique” – octobre 2025 – https://www.bild.de
Ifo Institut – Economic Outlook Germany, octobre 2025 – https://www.ifo.de
Blick – La crise allemande gagne la classe moyenne et frappe aussi en Suisse – 28 octobre 2025 – https://www.blick.ch