Auditionnée ce mercredi 22 octobre au Sénat, la présidente-directrice du Louvre a souligné les importantes failles de vidéoprotection autour du Palais, au cœur de l’enquête sur le spectaculaire vol de joyaux commis dimanche dans la galerie d’Apollon. Elle a rappelé qu’une modernisation des dispositifs était prévu et qu’elle allait être accélérée — hypervision, doublement des caméras, détection périmétrique — alors que l’ampleur du préjudice et les responsabilités interrogent l’État comme la direction du musée.
Trois jours après le braquage en plein jour de la galerie d’Apollon, Laurence des Cars s’est présentée, grave, devant la commission de la culture du Sénat. Si elle a salué le sang-froid des équipes et le déclenchement des alarmes internes, la dirigeante a pointé sans détour le talon d’Achille du Louvre : la surveillance des abords. « Le parc est très insuffisant, il ne couvre pas l’ensemble des façades », a-t-elle concédé, précisant qu’une caméra extérieure, orientée à l’ouest, ne couvrait pas le balcon par lequel les malfaiteurs ont pénétré. Cette faiblesse de la protection périmétrique, déjà identifiée, a permis aux voleurs d’approcher la façade depuis le quai et d’opérer en quelques minutes. Selon De Cars, l’arrivée des cambrioleurs n’a pas été repérée suffisamment en amont.
Le scénario, désormais étayé par l’enquête et les premiers récits officiels, est d’une audace méthodique : un camion-nacelle positionné quai François-Mitterrand, des gilets de chantier pour se fondre dans le décor, une fenêtre attaquée à la disqueuse, puis des vitrines de haute sécurité entamées pour saisir les pièces par des brèches. L’opération n’aurait pas excédé sept minutes. Les cambrioleurs se sont enfuis en abandonnant la couronne de l’impératrice Eugénie, endommagée dans la fuite. Huit autres joyaux ont disparu, dont des éléments majeurs des parures de saphirs de Marie-Amélie et d’Hortense, ainsi que des pièces de Marie-Louise.
Au Sénat, la présidente-directrice a replacé ces défaillances dans un contexte plus large de vétusté technique. Elle a rappelé avoir lancé un schéma directeur de sûreté évalué à 80 millions d’euros : doublement du maillage de caméras sur l’ensemble du domaine, modernisation des accès par badge, hyperviseur centralisant l’analyse d’images, renforcement des détections et de la vidéoprotection en extérieur. Des mesures de court terme sont également envisagées pour tenir à distance les véhicules aux abords immédiats et, le cas échéant, étudier l’implantation d’un commissariat au sein du site.
Cette mise à niveau s’inscrit dans la « Nouvelle Renaissance du Louvre », chantier présidentiel plus vaste décidé l’année dernière, dont la dimension sécuritaire apparaît désormais cruciale. Les alertes n’étaient pas nouvelles : dès février, devant des sénateurs, l’administrateur général du Louvre évoquait le « délabrement » d’équipements essentiels — sûreté, électricité, huisseries — tandis que des extraits d’un prérapport de la Cour des comptes, ont fuité ces derniers jours, pointant des retards « considérables » et « persistants » dans le déploiement des systèmes de protection.
Reste l’épineuse question des responsabilités. À l’issue du braquage, l’exécutif a condamné un « coup porté au patrimoine national » et promis des moyens pour retrouver les pièces et durcir la sécurité. Selon des informations confirmées par la presse, Laurence des Cars a proposé sa démission ; elle a été refusée par l’Élysée afin d’éviter une « sanction à chaud » avant la pleine lumière sur les failles et l’organigramme de décision. L’enquête, confiée à des services spécialisés, s’attache désormais à exploiter les traces et à démêler l’éventuelle dimension commanditée de ce vol, tandis que le musée a rouvert au public.
Au-delà du choc, l’audition aura figé une priorité : faire du Louvre, monument historique « par nature ouvert », un lieu mieux protégé sans se muer en forteresse. Selon De Cars, le défi se joue hors les murs, là où l’insuffisance d’yeux électroniques a laissé passer l’essentiel : l’approche, discrète et rapide, d’une équipe déterminée. C’est précisément cet extérieur que le musée promet désormais de couvrir, jusqu’au dernier angle mort, même si cela n’est sans doute pas sans poser des questions d’ordre juridique et de débats en terme de compétences. Le président de la République a demandé ce matin une accélération de la sécurisation des abords du Louvre en partenariat avec la Préfecture et la Ville de Paris.
Sources :
Le Monde – EN DIRECT, cambriolage au Louvre : audition de Laurence des Cars (22 octobre 2025) – lien
Reuters – Thieves rob priceless jewels from Paris’ Louvre in brazen heist (19 octobre 2025) – lien
Reuters – What jewels did the Louvre thieves target? (19 octobre 2025) – lien
France 24 – La patronne du Louvre en première ligne après le vol des joyaux (22 octobre 2025) – lien
Public Sénat – EN VIDÉO : il y a 7 mois, alerte sur le « délabrement des équipements » (20 octobre 2025) – lien
Sénat – Bijoux volés : audition de la présidente du Louvre (agenda, 22 octobre 2025) – lien