Les États-Unis ont annoncé des sanctions inédites contre plusieurs personnalités européennes engagées dans la régulation des grandes plateformes numériques, dont l’ancien commissaire européen Thierry Breton. Cette décision de l’administration Trump, justifiée au nom de la liberté d’expression, provoque une vive réaction politique en Europe et ravive les tensions transatlantiques autour du Digital Services Act, le texte régulant les plateformes de réseaux sociaux sur le territoire européen.
Un nouveau front diplomatique s’est ouvert mardi 23 décembre entre Washington et Bruxelles. L’administration du contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Donald J. Trump a décidé de sanctionner cinq personnalités européennes impliquées dans la régulation du secteur des nouvelles technologies, leur interdisant notamment l’entrée sur le territoire américain. Parmi elles figure Thierry Breton, ancien DG du groupe Atos membre du Forum économique mondial ancien commissaire au marché intérieur de l’Union européenne qui fût le principal artisan du Digital Services Act (DSA) avec Cédric O ancien secrétaire d’Etat au numérique et frère de la contributrice du FEM, Delphine O.
Le département d’État américain justifie ces mesures par la nécessité de lutter contre ce qu’il qualifie de dérives de « censure » contraires aux intérêts des États-Unis. Sur le réseau X, le secrétaire d’État Marco Rubio a accusé des responsables européens de mener, selon lui, des actions concertées afin de contraindre les plateformes américaines à modérer des opinions relevant du débat public outre-Atlantique. L’administration Trump affirme désormais ne plus tolérer ce qu’elle décrit comme une censure extraterritoriale exercée depuis l’Europe.
La réaction de Thierry Breton qui a rejoint le Global Advisory Council de Bank of America, banque membre du Forum économique mondial, après avoir quitté la Commission européenne n’a pas tardé. Dans un message publié dans la nuit du mardi au mercredi 24 décembre, l’ancien commissaire s’est interrogé sur un possible retour d’un climat rappelant le maccarthysme des années 1950, en référence aux persécutions idéologiques menées à l’époque aux États-Unis. Il a rappelé que le DSA avait été adopté à une écrasante majorité par le Parlement européen et approuvé à l’unanimité par les vingt-sept États membres, soulignant le caractère démocratique de ce texte destiné à encadrer les services numériques. Selon lui, l’accusation de censure relève d’un contresens sur les objectifs de la législation européenne.
Outre Thierry Breton, quatre représentants d’organisations non gouvernementales sont également visés par les sanctions. Les noms ont été rendus publics par la sous-secrétaire d’État américaine chargée de la diplomatie publique, Sarah Rogers. Il s’agit d’Imran Ahmed, directeur du Center for Countering Digital Hate, une organisation basée au Royaume-Uni qui mène des enquêtes sur la désinformation en ligne, les discours de haine et les plateformes numériques, de la contributrice de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Clare Melford, liée à un index britannique de la désinformation, ainsi que d’Anna-Lena von Hodenberg liée également au CCDH et Josephine Ballon, ancienne directrice exécutive du Global Network Initiative (GNI), une organisation réunissant grandes entreprises technologiques, ONG et universitaires autour des questions de liberté d’expression, droits humains et vie privée en ligne. Les deux dernières personnalités citées font également partie de l’ONG allemande HateAid censée lutter contre la haine et le harcèlement en ligne et de défendre les droits fondamentaux dans l’espace numérique.
Tous sont accusés par Washington d’avoir joué un rôle central dans la mise en place d’un système de censure dans le cadre des initiatives européennes ou internationales de lutte contre la désinformation et les discours de haine en ligne.
Les autorités américaines précisent qu’aucune des personnes sanctionnées n’occupe actuellement de fonctions officielles au sein d’un gouvernement européen ou britannique. Elles les accusent néanmoins de chercher à influencer indirectement le débat public américain, notamment à travers la mise en œuvre du DSA, perçu aux États-Unis comme une menace pour la liberté d’expression.
La France a réagi avec fermeté. Le ministre des affaires étrangères et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Jean–Noël Barrot a dénoncé sur X la restriction de visas imposée à Thierry Breton et aux autres personnalités européennes, rappelant que les peuples européens sont souverains dans la définition des règles applicables à leur espace numérique. Il a insisté sur le fait que le DSA vise uniquement à garantir que ce qui est illégal hors ligne le soit également en ligne, sans aucune portée extraterritoriale.
Le ministre chargé de l’Europe, Benjamin Haddad, passé par le programme Young Leader France-Amérique fondé par les présidents Ford et VGE membres du groupe Bilderberg a lui aussi exprimé son soutien, invoquant la défense de l’État de droit et de la souveraineté européenne.
Le président français et contributeur du FEM, Emmanuel Macron a dénoncé, ce mercredi 24 décembre, la décision de l’administration Trump y voyant une atteinte à « la souveraineté numérique européenne ».
La tension était déjà montée d’un cran début décembre, lorsque l’Union européenne a infligé une amende de 120 millions d’euros au réseau social X, propriété d’Elon Musk qui avait décidé de faire de Twitter le royaume de la liberté d’expression. Une décision que Marco Rubio avait alors qualifiée d’attaque contre les entreprises technologiques américaines.
Washington considère l’arsenal juridique européen en matière de numérique, comme le plus contraignant au monde pour les grandes plateformes, mais les Etats-Unis ne sont pas les seuls critiques. Au mois de septembre dernier, l’ONG Civilization Works a publié un rapport s’appuyant sur les Twitter Files France intitulé « Comment la France a inventé le complexe industriel de censure ? » qui accuse l’Etat français d’avoir mis en place système de censure transnational.