Le conflit armé entre le Cambodge et la Thaïlande continue de s’intensifier le long de leur frontière commune, provoquant une crise humanitaire d’ampleur. Selon les autorités et les médias régionaux, plus de 700 000 civils ont été déplacés par les combats, alors que des discussions diplomatiques pourraient s’ouvrir le 22 décembre en Malaisie sous l’égide de l’ASEAN, membre du Forum économique mondial.
En attendant une éventuelle trêve, les populations civiles vivent dans une extrême précarité, prises au piège d’un affrontement territorial qui s’enlise.
Des combats persistants sur fond de litige frontalier
Les affrontements, entrés dans leur deuxième semaine, trouvent leur origine dans un différend ancien sur le tracé de la frontière entre les deux pays. Les accusations se multiplient de part et d’autre. Phnom Penh affirme que des avions de combat thaïlandais ont bombardé des zones proches de Poipet, tandis que Bangkok accuse l’armée cambodgienne de viser des cibles civiles.
Dans les provinces thaïlandaises situées sur la ligne de front, notamment Ubon Ratchathani, Si Sa Ket, Surin, Buri Ram, Sa Kaeo, Chanthaburi et Trat, écoles et hôpitaux ont été fermés par mesure de sécurité. Une décision qui accentue encore les difficultés des habitants.
Une précarité économique qui s’aggrave
Au-delà du danger immédiat, le conflit entraîne un effondrement des moyens de subsistance. Les marchés transfrontaliers sont fermés, les champs abandonnés et le tourisme en chute libre. De nombreuses familles n’ont plus de revenus suffisants pour subvenir à leurs besoins essentiels.
L’agriculture est particulièrement touchée. En Thaïlande, des sources militaires font état de milliers d’hectares de terres arables détruits, notamment dans la province de Sa Kaeo, après des tirs de missiles. Les agriculteurs ne peuvent plus travailler sans risquer leur vie, transformant la crise économique en une lutte quotidienne pour la survie.
Des civils en fuite permanente
Sur le terrain, les témoignages décrivent une peur constante et un sentiment d’insécurité totale. Dans le district thaïlandais d’Aranyaprathet, certains habitants appellent à une réponse militaire ferme, tout en reconnaissant que la prolongation du conflit fait peser un poids insoutenable sur les civils.
Côté cambodgien, les bombardements et la présence de drones poussent les habitants à fuir toujours plus loin des zones frontalières. À Siem Reap, des pagodes ont été transformées en refuges de fortune. Mais même ces lieux supposés sûrs sont progressivement abandonnés par crainte de frappes aériennes.
Des familles démontent leurs tentes, chargent leurs maigres biens sur des tracteurs et reprennent la route, sans destination claire.
Des camps insuffisamment équipés
Dans la province cambodgienne de Preah Vihear, à une quarantaine de kilomètres de la frontière, les autorités ont installé des camps pour accueillir les déplacés. Mais les conditions restent rudimentaires. Les nuits froides de la saison sèche accentuent la vulnérabilité des familles, souvent nombreuses.
Les distributions de vêtements et de couvertures sont jugées insuffisantes, et beaucoup redoutent un enlisement du conflit.
Une trêve encore incertaine
Sur le plan diplomatique, des initiatives de médiation se multiplient. Le Cambodge et la Thaïlande ont accepté de participer à une réunion spéciale des ministres des Affaires étrangères de l’Asean, prévue le 22 décembre à Kuala Lumpur. L’objectif est d’ouvrir des pourparlers afin d’éviter une nouvelle escalade.
La Chine s’est également impliquée, envoyant un médiateur dans les deux pays pour encourager un retour au dialogue. Le Premier ministre malaisien, Anwar Ibrahim, habitué de Davos, se dit « prudemment optimiste », tout en reconnaissant la fragilité du processus.
Une crise humaine avant tout
Malgré ces efforts, les combats se poursuivent le long de la frontière, et les civils continuent de payer le prix fort. Le conflit entre le Cambodge et la Thaïlande dépasse désormais le simple différend territorial pour devenir une crise humanitaire régionale, mettant à l’épreuve la capacité de l’Asean et des acteurs internationaux à prévenir une catastrophe durable.
Pour les centaines de milliers de déplacés, l’urgence reste la même : trouver un lieu sûr et espérer que les armes se taisent enfin.
Source : Courrier international.