Après avoir présenté sa démission, Sébastien Lecornu a finalement accepté de rester à Matignon. Emmanuel Macron l’a persuadé de « rempiler » au nom du devoir, non sans conditions : liberté sur la composition du gouvernement, adoption rapide du budget 2026 et dialogue renforcé avec les oppositions.
La valse-hésitation n’aura duré que quelques jours, mais elle aura tenu tout Paris en haleine. Sébastien Lecornu, démissionnaire depuis lundi, restera finalement Premier ministre. Une reconduction surprise, fruit de discussions intenses avec Emmanuel Macron, qui a su convaincre son chef de gouvernement de ne pas abandonner la barre au cœur d’une crise politique majeure.
Selon plusieurs sources concordantes citées par BFMTV, le président a multiplié les échanges en tête-à-tête avec Lecornu depuis le début de la semaine. Ce dernier, décrit par son entourage comme « épuisé mais lucide », avait posé plusieurs conditions fermes avant d’accepter de rester à Matignon. La première concernait le budget 2026, serpent de mer de la fin du quinquennat : le Premier ministre a exigé de pouvoir tout mettre en œuvre pour qu’il soit adopté d’ici au 31 décembre. Sur le réseau X (ex-Twitter), il a déclaré vouloir « tout faire pour donner un budget à la France avant la fin de l’année ».
La seconde condition touche au casting gouvernemental. Lecornu, conscient des tensions internes qui avaient précipité la chute de son précédent gouvernement, veut éviter de « reproduire les mêmes erreurs ». Emmanuel Macron lui aurait donc accordé une « carte blanche » sur la composition du nouveau cabinet, tant sur les profils que sur les équilibres politiques. « Les ministres doivent se déconnecter de l’élection présidentielle et des logiques partisanes », aurait-il insisté auprès du chef de l’État.
Enfin, le Premier ministre souhaite qu’un suivi concret soit assuré sur les discussions menées avec les oppositions lors des récentes consultations. « C’est une question de confiance vis-à-vis de nos interlocuteurs », a expliqué un proche, insistant sur la nécessité d’un dialogue institutionnel plus stable. Lecornu, qui s’était décrit lui-même comme un « moine soldat », entend ainsi préserver une certaine continuité dans la gouvernance tout en imposant sa méthode.
Mais cette reconduction à haut risque ne calme pas les tensions politiques. Dès l’annonce officielle, les principales forces d’opposition ont promis une motion de censure. Le Rassemblement national et La France insoumise ont d’ores et déjà annoncé qu’ils déposeraient chacun leur texte, suivis par le Parti communiste et l’UDR d’Éric Ciotti. Les écologistes, par la voix de Marine Tondelier, ont eux aussi affirmé qu’ils ne voyaient « aucun argument pour ne pas censurer » le futur gouvernement.
Le Parti socialiste, souvent considéré comme possible pivot dans les votes à l’Assemblée, a nié tout accord tacite avec Matignon. « Il n’y a absolument aucun deal, aucune assurance ni garantie », a tranché Pierre Jouvet, secrétaire général du PS, sur BFMTV.
Malgré ce climat de défiance, Emmanuel Macron parie sur la solidité de son tandem avec Sébastien Lecornu, perçu comme un loyal exécutant et un homme d’ordre. En acceptant de rester « par sens du devoir », le Premier ministre espère regagner du crédit parlementaire et restaurer une forme de stabilité politique — à défaut d’un véritable consensus.
Sources :
BFMTV – « Comment Emmanuel Macron a convaincu Sébastien Lecornu d’accepter de rempiler à Matignon » – 11 octobre 2025