En déplacement à Amsterdam, la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a exhorté les responsables politiques à durcir la régulation de la finance non bancaire. Fonds d’investissement, retraites et cryptomonnaies sont dans le viseur d’une BCE qui se dot soucieuse de prévenir les risques systémiques.
Vendredi 3 octobre à Amsterdam, Christine Lagarde a de nouveau haussé le ton sur un sujet qu’elle juge central pour la stabilité financière européenne : la finance non bancaire. La présidente de la Banque centrale européenne (BCE) a appelé à un renforcement du cadre réglementaire visant les acteurs qui, sans être des banques à proprement parler, exercent des activités proches ou entretiennent des liens étroits avec le secteur bancaire traditionnel.
« Les responsables politiques doivent œuvrer à renforcer les normes applicables aux établissements non bancaires qui exercent des activités similaires à celles des banques ou qui ont des liens importants avec le secteur bancaire », a déclaré Christine Lagarde, citée par l’AFP. Cette catégorie englobe une vaste galaxie d’acteurs : fonds de pension, sociétés de gestion, fonds d’investissement alternatifs mais aussi plateformes de cryptomonnaies.
Depuis plusieurs années, la BCE s’inquiète de la montée en puissance de ces entités souvent peu encadrées, qui gèrent pourtant des volumes d’actifs considérables. Selon Lagarde, une surveillance accrue permettrait non seulement de prévenir les risques de contagion en cas de crise financière, mais aussi de rétablir des conditions de concurrence équitables entre établissements bancaires et non bancaires. « Les exigences plus strictes permettront de répondre aux préoccupations des banques concernant l’inégalité des conditions de concurrence », a-t-elle ajouté.
La présidente de la BCE s’est toutefois dite favorable à un maintien du niveau actuel de régulation bancaire, tout en évoquant la possibilité de simplifications techniques pour les établissements déjà conformes aux règles en vigueur. Mais pour la dirigeante européenne, le message est clair : il ne faut pas attendre une nouvelle crise pour agir. « Les responsables politiques ne devraient pas attendre une nouvelle crise financière pour se rappeler l’importance des enjeux », a-t-elle insisté.
Cette mise en garde fait écho à l’annonce récente de la Banque de France, qui prévoit de soumettre cette année les fonds d’investissement à un “stress test”, un test de résistance habituellement réservé aux banques et aux compagnies d’assurance. Objectif : évaluer la résilience de ces acteurs face à un choc de marché ou à une vague de retraits massifs, comme celle observée lors de la crise de la dette ou du krach obligataire de 2022.
À travers cette initiative, Christine Lagarde entend rappeler que la stabilité financière ne peut plus se limiter aux institutions bancaires classiques. Dans une économie mondialisée, la frontière entre finance réglementée et finance parallèle est de plus en plus poreuse, et c’est bien cette zone grise que la BCE veut désormais ramener sous contrôle.
La sortie de Lagarde intervient également après que la présidente de la BCE est annoncé un calendrier un peu plus précis pour l’entrée en vigueur de l’euro numérique qui sera une version digitale de l’euro émise par la Banque centrale européenne afin d’offrir un moyen de paiement public et sécurisé dans toute l’UE, indépendant des acteurs privés comme Visa ou Mastercard. Prévu vers 2028-2029, il sera géré via des portefeuilles numériques proposés par les banques, avec un plafond de détention pour ne pas concurrencer le système bancaire. Il aura cours légal et pourra être utilisé même sans connexion internet. Officiellement, il ne remplacera pas les espèces, mais beaucoup craignent qu’il entraîne à terme leur disparition et permette à la BCE de suivre de près les habitudes de consommation des citoyens, soulevant des inquiétudes sur la vie privée et le contrôle des données financières.