Vestiges romains, mosquées ancestrales, églises séculaires : l’exceptionnel patrimoine de Gaza s’effondre sous les bombardements israéliens. Plus des deux tiers des sites historiques ont disparu depuis octobre 2023, emportant une mémoire plusieurs fois millénaire. Archéologues et ONG dénoncent un « mémoricide ».
La guerre ne détruit pas seulement des vies humaines : elle efface aussi des civilisations. À Gaza, le patrimoine historique et culturel, témoin de milliers d’années d’histoire, s’effondre sous les frappes israéliennes. Selon des archéologues palestiniens et britanniques cités par The Guardian, plus des deux tiers des 354 sites répertoriés par l’Unesco avant octobre 2023 ont été rasés ou gravement endommagés.
Le port antique d’Anthédon, fondé au VIIIe siècle avant J.-C. par les Grecs, a été détruit. L’église orthodoxe de Saint-Porphyre, la troisième plus ancienne église encore en activité dans le monde, a été touchée. La grande mosquée de Gaza, érigée sur les fondations d’un temple cananéen datant du IIe millénaire avant J.-C., n’est plus qu’un amas de gravats. Musées, bibliothèques et universités ont eux aussi disparu dans les bombardements. « Bombarder un musée ou une mosquée datant de plusieurs siècles, ce n’est pas seulement détruire des pierres, c’est effacer les racines d’un peuple », a dénoncé un responsable d’Icomos Palestine. Pour lui, il s’agit d’un « mémoricide ».
Ce patrimoine unique racontait une histoire plurielle : celle des Égyptiens, des Cananéens, des Byzantins, mais aussi des dynasties islamiques, des Juifs, des Perses, des Grecs et des Nabatéens qui, au fil des siècles, ont marqué la côte méditerranéenne. « Gaza était une mosaïque d’héritages et de civilisations, désormais pulvérisée », résume Al-Jazeera.
Mais alors que la guerre continue de détruire la mémoire matérielle de l’enclave, Washington projette déjà un futur radicalement différent. Selon un document révélé par The Washington Post, l’administration Trump envisage de placer Gaza sous tutelle américaine pendant dix ans, afin d’y construire des « stations balnéaires » et des « centres technologiques ». Un plan critiqué par The Guardian, qui dénonce une vision centrée sur les hôtels et les centres commerciaux, au détriment des habitants et de l’histoire de la région.
Pour de nombreux observateurs, cette approche revient à effacer deux fois Gaza : une première fois par la guerre, une seconde par une reconstruction déconnectée de son identité. « Les destructions actuelles ne visent pas seulement les bâtiments, mais la mémoire collective et culturelle d’un peuple », conclut Tehran Times.
Sources :
Courrier international – Vidéo. À Gaza, un patrimoine millénaire dont il ne restera que des ruines – 5 septembre 2025 – lien
The Washington Post – Trump administration’s postwar Gaza reconstruction plan – septembre 2025 – lien
The Guardian – Destruction of Gaza’s historical sites is a ‘memoricide’ – septembre 2025 – lien
Tehran Times – Gaza’s cultural heritage under attack – septembre 2025 – lien
Al-Jazeera – Gaza’s ancient heritage reduced to rubble – septembre 2025 – lien