Face aux restrictions américaines, Alibaba dévoile une puce d’IA conçue pour remplacer les processeurs Nvidia interdits en Chine. Entièrement produite sur le sol chinois, elle pourrait bouleverser l’équilibre technologique mondial et renforcer la stratégie cloud et IA du géant de l’e-commerce.
La guerre technologique entre la Chine et les États-Unis franchit une nouvelle étape. Le groupe Alibaba a annoncé le lancement d’une puce d’intelligence artificielle destinée à l’inférence, c’est-à-dire à l’exécution de modèles déjà entraînés. Une innovation qui tombe à point nommé : depuis 2025, les sanctions américaines interdisent à Nvidia de vendre ses composants les plus avancés au marché chinois.
Longtemps client majeur de Nvidia, Alibaba mise désormais sur l’indépendance. Selon le Wall Street Journal, la nouvelle puce a été conçue pour être totalement compatible avec les logiciels et frameworks de développement de Nvidia. Autrement dit, les entreprises n’auront pas à réécrire leurs codes pour migrer leurs applications. Un argument de poids dans un contexte où la transition rapide vers une alternative fiable est stratégique.
La nouveauté réside aussi dans sa fabrication : contrairement aux précédents processeurs d’Alibaba, produits par TSMC à Taïwan, ce composant est intégralement conçu et fabriqué en Chine, grâce à des capacités locales. De quoi réduire les vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement et contourner les restrictions américaines.
Une riposte technologique structurée
Dotée d’une architecture RISC-V open source, la puce est hautement personnalisable et affranchie des dépendances aux technologies occidentales. Elle se positionne comme une alternative directe au H20 de Nvidia, avec une disponibilité garantie sur le marché chinois. Capable de gérer une large palette d’applications d’inférence – de la reconnaissance d’images au traitement du langage naturel – elle s’intègre immédiatement à l’infrastructure Alibaba Cloud.
Cette annonce s’inscrit dans une stratégie massive d’investissement : le directeur général Eddie Wu a confirmé un plan de 53 milliards de dollars sur trois ans dans l’intelligence artificielle et le cloud. Les résultats financiers accompagnent ce virage : le chiffre d’affaires cloud d’Alibaba a bondi de 26 %, et les produits IA représentent désormais plus de 20 % de son activité externe, après huit trimestres consécutifs de croissance à trois chiffres.
Nvidia fragilisé en Chine
L’effet sur les marchés a été immédiat : l’action Alibaba s’est envolée de 13 %, tandis que Nvidia reculait de 3 % malgré des résultats financiers solides. Le groupe américain a pourtant annoncé un chiffre d’affaires trimestriel record de 46,7 milliards de dollars (+56 % sur un an), mais ses perspectives restent brouillées par l’incertitude en Chine.
Face à Alibaba, d’autres acteurs chinois cherchent aussi à combler le vide laissé par Nvidia. Huawei développe ses puces Ascend, parfois jugées supérieures au système Blackwell de son rival américain. À Shanghai, MetaX propose un équivalent local du H20 en combinant deux processeurs maison. Enfin, Cambricon, avec sa puce Siyuan 590, revendique déjà des performances proches de l’H100 de Nvidia, et a vu son chiffre d’affaires bondir à 247 millions de dollars au deuxième trimestre 2025.
Vers une autonomie technologique chinoise ?
Le lancement de la nouvelle puce d’Alibaba illustre la volonté chinoise de construire une souveraineté technologique dans le domaine clé de l’intelligence artificielle. Si l’indépendance totale vis-à-vis des technologies occidentales n’est pas encore atteinte, le compte à rebours semble enclenché. Dans une compétition où se mêlent enjeux industriels, financiers et géopolitiques, l’ombre d’Alibaba plane désormais sur un marché que Nvidia dominait jusqu’alors sans partage.
Sources :
eWeek – New Alibaba AI Chip Could Replace Nvidia Hardware in China, 29 août 2025 – lien
The Wall Street Journal – Alibaba develops domestic AI chip amid U.S. restrictions, août 2025 – lien
