Avec plus de 300 millions de personnes âgées de plus de 60 ans, la Chine explore une nouvelle voie : le recours à des humanoïdes pour accompagner ses seniors. Dans plusieurs établissements, ces machines commencent déjà à jouer aux échecs, aider à la mobilité ou offrir des soins, esquissant une révolution sociétale et économique.
Dans une maison de retraite de Shenzhen, au sud de la Chine, une pensionnaire s’étonne de la voix douce et des gestes presque humains de Xia Lan, un robot humanoïde conçu pour interagir avec les personnes âgées. Rires et curiosité accompagnent ses pas, tandis que d’autres pensionnaires sollicitent une danse ou une partie d’échecs. La scène, relatée par le China Daily, illustre la stratégie adoptée par Pékin : intégrer intelligence artificielle et robotique dans le soin aux seniors.
Le défi est colossal. La Chine compte aujourd’hui 310 millions de personnes âgées de plus de 60 ans, soit près de 22 % de sa population. D’ici 2035, elles seront environ 400 millions, représentant presque un tiers du pays. Dans le même temps, le déficit d’aidants est abyssal : il manquerait près de 10 millions de professionnels pour respecter la norme nationale d’un aidant pour quatre personnes âgées, selon la chaîne publique CCTV.
Face à cette équation démographique, la robotique est perçue comme un levier incontournable. Le marché potentiel est estimé à près de 500 milliards de yuans (environ 60 milliards d’euros), selon Wang Lei, directeur de l’entreprise Qingbao Robot. À terme, lorsque le prix d’un robot d’assistance tournera autour de 50 000 yuans (6 000 euros), l’achat pourrait concerner une personne âgée sur trente.
Si les modèles actuels demeurent limités – la plupart ne pouvant soulever plus de 5 kilos –, les chercheurs et entreprises multiplient les prototypes. À Shanghai, l’université Fudan prépare l’introduction de Guanghua N° 1 dans un hôpital, tandis que la société norvégienne 1X développe Neo Gamma, un majordome humanoïde déjà capable de passer l’aspirateur ou préparer du café. L’objectif affiché est d’arriver à des compagnons dotés non seulement de force physique, mais aussi d’une intelligence émotionnelle, capables d’écouter, réconforter et créer du lien affectif.
Reste à savoir si la population acceptera cette substitution partielle aux aidants humains. Comme l’explique une jeune Chinoise interrogée par El País, ses grands-parents refuseraient l’idée de confier leur quotidien à une machine. Mais elle-même admet qu’à l’avenir, cette pratique deviendra sans doute « la norme ». Entre espoir technologique et interrogations éthiques, la Chine avance ainsi en pionnière d’un modèle qui pourrait bientôt s’étendre bien au-delà de ses frontières.
Sources :
Courrier international – « En Chine, 300 millions de seniors… et des humanoïdes pour en prendre soin » – lien