À Roubaix, l’artiste néerlandaise Judith de Leeuw a frappé fort avec une fresque monumentale où la statue de la Liberté se couvre le visage de honte. L’œuvre, exposée lors de l’URBX Festival, a déclenché une vague d’émotions bien au-delà des frontières françaises, suscitant autant d’admiration que de controverses.
C’est dans une ancienne friche industrielle de Roubaix, ville ouvrière du nord de la France, que l’image a surgi comme un uppercut visuel : sur fond noir, la statue de la Liberté se cache les yeux, comme accablée par le spectacle de la politique américaine. Réalisée en six jours à l’occasion de l’URBX Festival, dédié aux cultures urbaines, cette fresque monumentale de quinze mètres signée Judith de Leeuw, muraliste néerlandaise de 29 ans, a rapidement dépassé le cadre local pour devenir un phénomène viral… jusqu’aux États-Unis.
Intitulée La protestation silencieuse de la statue de la Liberté, l’œuvre dénonce les orientations politiques du second mandat de Donald Trump : répression des migrants, atteintes aux droits des femmes, pression sur les médias et la culture. “ La statue de la Liberté, offerte par les Français à l’Amérique en gage d’amitié, ne peut plus regarder ce qu’elle voit ”, explique l’artiste à France 3. Elle y projette un sentiment de fatigue et de résignation, partagé par une partie de l’opinion publique américaine.
L’image a été largement relayée outre-Atlantique, notamment par USA Today, touchant un public bien au-delà du cercle des amateurs d’art urbain. De nombreux Américains y ont vu une résonance symbolique forte. Le geste de l’artiste a été salué comme un message de solidarité transatlantique, dans une ville française elle-même marquée par les fractures sociales et une forte population issue de l’immigration.
Mais cet enthousiasme a été terni par une controverse : certains observateurs ont souligné la parenté esthétique et conceptuelle entre cette fresque et Oh America, œuvre militante de Gee Vaucher datant de 1987. L’artiste anglaise, proche des milieux anarcho-punk, avait déjà représenté la statue dans un geste similaire, devenu emblème visuel de la critique anti-Trump depuis 2017. Judith de Leeuw affirme ne pas connaître cette œuvre antérieure, parlant d’une coïncidence d’inspiration.
Quoi qu’il en soit, le succès retentissant de cette fresque, installée près de la gare de Roubaix, confirme l’ancrage grandissant du street art dans les débats contemporains, mêlant symbolisme, résonance politique et puissance visuelle. À Roubaix, l’art de rue redevient cri, miroir et mémoire collective.
Source : BeauxArts.com (11 juillet 2025).