La Commission européenne a écarté l’idée d’une taxe numérique spécifique dans son futur budget 2028–2035, révélant un changement de cap notable. Apple, Google ou Meta ne seront finalement pas directement ciblés, une décision qui s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu avec les États-Unis.
C’est une volte-face qui n’a pas fait grand bruit, mais dont les implications fiscales et diplomatiques sont majeures. Dans un document préliminaire révélé par Politico le 11 juillet, la Commission européenne renonce à l’introduction d’une taxe numérique ciblée, initialement pensée pour contraindre les grandes plateformes technologiques à contribuer plus équitablement aux finances publiques de l’Union. Cette mesure était pourtant encore sur la table au printemps, présentée comme un pilier potentiel du budget pluriannuel 2028–2035 de l’UE.
Les grandes entreprises numériques comme Apple, Amazon, Meta ou Google – qui réalisent des bénéfices considérables grâce aux consommateurs européens sans implantation physique équivalente – étaient les premières concernées. Mais dans la dernière version du projet de financement, la taxe a disparu au profit de trois nouveaux leviers fiscaux : une harmonisation sur les produits du tabac, une taxe sur les déchets électroniques, et une contribution des grandes entreprises opérant dans l’UE au-delà de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Ces mesures, plus transversales, incluront potentiellement Apple ou Meta, mais sans ciblage explicite du numérique.
Ce retrait s’explique aussi par des facteurs externes. L’UE est actuellement en pourparlers avec Washington sur les taxes commerciales. Dans ce contexte, relancer un projet de taxation unilatérale contre les géants du numérique – majoritairement américains – aurait pu tendre davantage des discussions déjà complexes. Cette prudence semble traduire une volonté d’éviter l’escalade fiscale et de maintenir un climat favorable aux négociations.
Malgré ce recul, la surveillance des pratiques des GAFAM ne faiblit pas à Bruxelles. Apple reste en ligne de mire du Digital Markets Act, un arsenal juridique destiné à réguler les plateformes dominantes. Des procédures sont en cours, et la Commission n’a pas renoncé à faire valoir sa vision d’un marché numérique plus équitable – mais par d’autres voies que la taxation directe.
La version définitive du budget européen 2028–2035 est attendue le 16 juillet. Mais la tendance est claire : Bruxelles choisit une approche plus souple face aux géants de la tech, au prix d’un recul fiscal stratégique que d’aucuns qualifieront de tactique.
Source : Politico.