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Porrentruy. Photo : @Nerijp

Suisse : la piscine de Porrentruy interdit les non-résidents et déclenche une polémique transfrontalière

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La décision du maire de Porrentruy, en Suisse, d’interdire l’accès de sa piscine municipale aux non-résidents jusqu’à fin août suscite de vives réactions en France et en Suisse. Cette mesure, motivée par des débordements, est dénoncée comme une “punition collective” et un acte “xénophobe” visant les jeunes Français frontaliers.

À Porrentruy, petite commune du canton suisse du Jura, la saison estivale a débuté sur fond de polémique. Depuis le 4 juillet et jusqu’au 31 août, l’accès à la piscine municipale est strictement réservé aux résidents. Selon les autorités, cette interdiction répond à la montée des incivilités et au comportement jugé “ingérable” de certains groupes de jeunes, notamment français. Une mesure radicale qui n’est pas sans rappeler celle adoptée en 2020 lors de la pandémie de Covid-19, mais qui, cette fois, révèle des tensions transfrontalières sous-jacentes.

“Porrentruy crée un dangereux précédent”, avertit le quotidien suisse Le Temps dans un éditorial. Le maire, Philippe Eggertswyler, se défend de toute discrimination, mais la presse helvète souligne que ce sont “essentiellement des Français” qui sont visés, en particulier des jeunes frontaliers venus de communes limitrophes comme Montbéliard. Dans Blick, la Commission fédérale contre le racisme qualifie la mesure de “problématique” et suggère plutôt des interdictions individuelles ciblant uniquement les personnes responsables de troubles.

À gauche, la députée socialiste jurassienne Mathilde Crevoisier dénonce une décision “disproportionnée”, tandis que la Jeunesse socialiste jurassienne parle d’une mesure “scandaleuse, xénophobe et stigmatisante” relevant d’un “trumpisme” inquiétant. Du côté du gouvernement local, l’interdiction est perçue comme une atteinte à l’image de marque du canton du Jura, réputé pour son ouverture aux travailleurs frontaliers.

La presse suisse évoque également un possible incident diplomatique : selon Blick, l’ambassade de France à Berne envisage d’intervenir dans ce dossier qui, en pleine saison touristique, ternit l’image de la Suisse. Dans Le Matin, on note une “situation cocasse” sur la scène politique : en France, Christian Zimmermann, élu RN du Grand Est, dénonce une mesure “discriminatoire”, tandis qu’en Suisse, Thomas Stettler de l’UDC (extrême droite) applaudit l’interdiction et fustige l’immigration.

L’affaire a rapidement traversé la frontière. CNews et Europe 1 se sont emparés du sujet, relayant l’interview d’un responsable du Syndicat intercommunal du district de Porrentruy, qui a qualifié les jeunes Français venus à la piscine de “délinquants” et de “racaille”. Un vocabulaire qui, rappelle le média zurichois Watson, désigne désormais de façon stigmatisante les jeunes Noirs et Arabes des banlieues françaises. Richard Werly, correspondant en France pour Blick, résume avec une pointe d’ironie : “La Suisse disciplinée, qui sait mettre de l’ordre et traiter les mauvais Français comme ils le méritent, a désormais sa ville fétiche vue de Paris : Porrentruy !”

Sur les réseaux sociaux français, les soutiens à la municipalité suisse abondent, dépeignant une ville “assiégée” par les habitants des quartiers populaires frontaliers, tandis que d’autres internautes s’offusquent d’une telle mesure. Pour Yves Petignat, chroniqueur au Temps, cette décision révèle surtout un état d’esprit grandissant : celui d’une région qui ne considère les frontaliers que comme une main-d’œuvre indispensable, tout en se refermant sur elle-même. “Voyez, chers cousins, amis touristes, ce qu’il advient des peuples et de leurs maires à l’ère du populisme”, conclut-il.

Source : Courrier International, Le Temps, Blick, Watson, Le Matin.

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