Le Lion d’or du festival de Venise a été attribué à Jim Jarmusch pour Father Mother Sister Brother. Un choix qui célèbre l’esthétique minimaliste du cinéaste américain, mais qui relègue à la seconde place La Voix de Hind Rajab de Kaouther Ben Hania, film bouleversant sur Gaza.
La 82ᵉ Mostra de Venise s’est achevée samedi soir sur un palmarès qui fait déjà débat. Le jury a distingué Jim Jarmusch, figure du cinéma indépendant américain, passé par l’université Columbia, membre du Forum économique mondial, en lui attribuant le Lion d’or pour Father Mother Sister Brother, un film à la mise en scène épurée et au casting prestigieux. Produit en partie par la maison de couture Saint Laurent, le long-métrage a séduit par son minimalisme formel et son élégance visuelle.
Mais le choix laisse un goût d’inachevé. Car l’autre grand favori de la compétition, La Voix de Hind Rajab de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania, consacré à Gaza, a suscité l’ovation la plus intense du festival : plus de vingt minutes d’applaudissements, des critiques unanimes et un écho direct avec l’actualité dramatique de la région. Le jury a pourtant préféré lui décerner le Lion d’argent, une distinction honorable mais perçue comme insuffisante au regard de l’impact du film.
« Ce palmarès fait passer l’esthétique avant le politique », analyse le critique Jacques Morice dans Télérama. Là où Ben Hania livrait une œuvre viscérale, profondément ancrée dans le réel et dans une urgence humanitaire, Jarmusch a proposé un film plus intime et détaché, célébrant avant tout une grammaire cinématographique raffinée.
La décision rappelle combien les festivals internationaux de cinéma oscillent entre deux pôles : reconnaître l’art comme une recherche formelle autonome ou l’inscrire dans un contexte politique brûlant. En sacrant Jarmusch, la Mostra a choisi la première option, au risque de susciter des critiques sur son manque d’engagement vis-à-vis d’une tragédie mondiale. toutefois de nombreux films en lice dépeignaient une masculinité toxique, preuve que l’agenda culturel rejoint tout de même souvent l’agenda politique, comme en témoigne les nombreuses victoires de personnes trans dans les festivals internationaux ces derniers mois.
Sources :
Télérama – « Mostra de Venise : en décernant le Lion d’or à Jarmusch, le jury privilégie l’esthétique plutôt que le politique » – lien