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Travail et IA : Amazon, UPS, Salesforce… les licenciements “au nom de l’IA” masquent une réalité économique plus profonde

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Les géants américains de la tech justifient désormais leurs vagues de licenciements massifs par la montée en puissance de l’intelligence artificielle. Mais derrière ce discours d’adaptation technologique, se cachent des raisons économiques plus traditionnelles : rentabilité, pression des investisseurs et ralentissement du marché du travail.

La justification devient familière : “l’intelligence artificielle change tout”. C’est avec cet argument que Amazon a annoncé, mardi 28 octobre, la suppression de 14 000 emplois, invoquant la nécessité de “réorganiser ses effectifs face à l’essor de l’IA”. Selon ABC News, cette décision intervient “malgré des milliards de bénéfices” et une activité florissante dans le commerce en ligne comme dans le cloud computing.

Mais Amazon n’est pas seule à invoquer l’IA pour expliquer ses coupes. Ces derniers mois, une série d’entreprises américaines — SalesforceUPSChegg ou encore Meta — ont, elles aussi, mis en avant l’automatisation et les agents IA pour justifier des licenciements à grande échelle.
Le PDG de Salesforce s’en félicitait ouvertement : “Nos agents IA font désormais le travail”, déclarait-il en octobre, après la suppression de 4 000 postes dans le service client. UPS, de son côté, évoque 48 000 emplois supprimés depuis l’an dernier, en partie grâce à “l’apprentissage automatique”.

Cette vague inquiète les économistes, mais certains appellent à relativiser. “Tout le monde a tellement peur de l’effet potentiel de l’IA sur le marché du travail qu’il y a une réelle tendance à réagir de manière excessive”, nuance Martha Gimbel, directrice du Budget Lab de l’université Yale, interrogée par la BBC. Selon elle, ces licenciements massifs “ne sont pas encore la preuve que l’IA transforme fondamentalement l’emploi, mais plutôt un prétexte utilisé dans un contexte économique plus tendu”.

Des justifications technologiques, des motivations financières

L’IA est devenue un argument commode pour rassurer les marchés financiers. “Amazon et d’autres entreprises cherchent surtout à amortir les coûts colossaux de leurs investissements dans l’intelligence artificielle, observe Al-Jazeera. Ces sociétés injectent des milliards de dollars dans les infrastructures nécessaires à l’IA générative, sans pour autant constater un retour sur investissement immédiat.

Selon un rapport du Media Lab du MIT, mené auprès de 150 dirigeants, 95 % des projets IA d’entreprise n’ont produit aucun bénéfice concret. Malgré cela, la technologie reste un levier de communication puissant, justifiant la quête de productivité et la réduction de la masse salariale.

Un contexte économique fragile

Avec ses 350 000 salariés permanents et plus de 1,5 million de travailleurs précaires, Amazon explique que ces 14 000 suppressions représentent “seulement 4 % de ses effectifs”. Mais cette annonce intervient alors que le marché du travail américain ralentit et que les signaux économiques virent à l’orange. “Amazon doit agir pour continuer à afficher de bons résultats financiers”, explique un analyste de GlobalData, cité par CNN.

Pour The Wall Street Journal, la tendance est claire : “Les grandes entreprises américaines ont un message pour leurs employés de bureau : on n’a plus besoin de vous.” Ces dernières semaines, des dizaines de milliers de travailleurs du tertiaire — chez Target, Rivian Automotive ou General Motors — ont été licenciés ou placés sous préavis.

L’ombre de la politique et des marchés

Les causes profondes de cette “vague IA” sont à chercher ailleurs : incertitude politiqueinflation persistantehausse des coûts énergétiques et pression des investisseurs. Les dirigeants se montrent de plus en plus sensibles à la productivité immédiate, au détriment de l’innovation humaine. “Moins de conversations, plus d’efficacité”, aurait résumé la direction de Meta à ses équipes, selon Business Insider.

Mais certains médias, comme Forbes, s’inquiètent d’un effet pervers : “Les frictions au travail — ces moments où ça ne marche pas — ne sont pas l’ennemi du progrès. Elles sont ce qui donne du sens.” Pour le magazine économique, la question n’est plus seulement de savoir si l’IA va remplacer les emplois, mais si le travail humain gardera sa valeur dans un monde où la machine fait tout.

Dans les faits, l’intelligence artificielle ne remplace pas encore massivement les travailleurs. Elle justifie surtout, à court terme, une réduction stratégique des coûts dans un environnement incertain. Mais à long terme, préviennent les chercheurs du MIT, c’est la qualité et la nature du travail qui pourraient être redéfinies — plus que sa quantité.

Sources :
Courrier international – Travail. L’IA va-t-elle vraiment remplacer les emplois supprimés chez Amazon, UPS ou Salesforce ? (29 octobre 2025) – courrierinternational.com
ABC News – Amazon to cut 14,000 jobs citing AI transformation (28 octobre 2025)
BBC – AI blamed for layoffs, but experts urge caution (29 octobre 2025)
The Wall Street Journal – Corporate America’s new mantra: fewer desks, more data (octobre 2025)
MIT Media Lab – AI and the workplace: 300 corporate initiatives, zero returns (été 2025)

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