Le président russe Vladimir Poutine a une habitude bien établie de se rendre en Touva, une région proche de l’Altaï, où les chamanes perpétuent un culte ancestral à l’amanite tue-mouche. Cette tradition remonte aux cercles ésotériques influencés par le zoroastrisme et le mithraïsme jusqu’au XIe siècle de notre ère.
« Son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, vient de Touva. C’est une petite République en Sibérie. C’est comme les Amérindiens aux États-Unis. Et tous les trois mois, il l’emmène en Sibérie voir les chamanes. Et ils font des danses, presque sataniques », affirmait à propos de Poutine, le chroniqueur TV et ancien agent du KGB, Serguei Jirnov, le 28 février 2022, sur le plateau de TPMP. Cette déclaration a suscité des railleries sur les réseaux sociaux, mais les faits attestent que Poutine se rend effectivement régulièrement dans cette région.
Russie Beyond a rapporté que la célèbre photo de Vladimir Poutine montant torse nu à cheval a été prise en août 2009 lors de ses vacances en Touva. Le média a également noté que Poutine avait effectué l’un de ses premiers déplacements dans cette région dès 2007, en compagnie du prince Albert II de Monaco. En 2017 et 2018, Poutine aurait de nouveau visité la Touva en compagnie de Sergueï Choïgou, ministre de la Défense, et d’Alexandre Bortnikov, directeur du FSB, où ils ont été décrits comme ayant « cueilli des champignons et fait des grillades » selon nos confrères.

La Touva, tout comme l’Altaï, est renommée pour son chamanisme. Vladimir Poutine fréquente également l’Altaï pour ses vacances, comme en témoigne un incendie survenu dans une résidence présidentielle de cette région de Sibérie, selon le canal Telegram « Sirena »
Une culture chamanique issu du Zoroastrisme
Ces régions, situées au carrefour de la Russie, de la Chine et de la Mongolie, sont célèbres pour leurs chamanes qui utilisent l’Amanite tue-mouche, un puissant hallucinogène, lors de leurs cérémonies. Le culte rendu à ce champignon dans la région remonte aux cercles ésotériques sous influence iranienne jusqu’au XIe siècle de l’ère chrétienne. Ces cercles étaient imprégnés par le Zoroastrisme, qui mêle des éléments de polythéisme, de monothéisme et de dualisme, bien avant Mani, fondateur du manichéisme, insistant sur le dualisme du monde, mettant en avant le conflit entre la lumière et l’obscurité, le bien et le mal. Celui-ci est né en Iran plus d’un millénaire après Zoroastre et au moins 1500 ans après la composition du Rig-Veda, les textes sacrés de l’hindouisme faisant référence à Mitra, mais aussi à Shiva et à sa forme sombre, Rudra le Terrible, dans la vallée de l’Indus.
Shiva, également connu sous le nom de Shringin, qui signifie « le cornu », est l’une des nombreuses divinités cornues présentes dans diverses cultures d’origine indo-européenne, tout comme Dionysos et Mithra, dieux indo-iranien. Mitra en Inde et Mithra en Iran, ont évolué de manière différente. Mitra a en effet progressivement disparu dans l’hindouisme au profit des trois dieux, Brahim, Vishnu et Shiva, tandis que le culte de Mithra a été éliminé par Zorouastre en perse avant d’être rétabli après l’expédition d’Alexandre le Grand et de connaitre un fort succès chez les Sassanides. Il s’est également propagé dans le bassin méditerranéen durant l’antiquité, en grèce et dans l’empire romain, en particulier au sein des légionnaires, prenant la forme d’un culte à mystère, de type initiatique.
Les sinologues MM. Chavannes et Pelliot ont étudié l’utilisation de l’urine humaine dans les rituels des manichéens chinois après que ce culte ait été introduit en Chine par les Iraniens entre 694 et 719 après J.-C. Leur recherche offre des indications sur les rituels secrets qui pourraient être pratiqués en Touva. Ils décrivent l’usage de l’urine comme une forme d’« eau rituelle » utilisée pour des ablutions.
Un lien avec le culte des Illuminés de Bavière ?
Ces références au manichéisme et à Mithra, dieu martial, ne sont pas sans rappeler les Illuminés de Bavière, une société secrète fondée à Ingolstadt en 1776 par Adam Weishaupt. Cette organisation vouait en effet un culte à Arès, dieu grec de la guerre, et s’inspirait abondamment des références antiques. Les Illuminés de Bavière avaient pour ambition de renverser les princes et l’Église, tout en visant à instaurer un « nouvel ordre mondial ». Bien que leur existence ait été brève, environ une décennie, elle aurait eu le temps, selon des auteurs comme l’Abbé Barruel, Jean-Pierre-Louis de Luchet, Edouard Drumont et Umberto Eco, d’infiltrer la franc-maçonnerie et d’influencer la formation de sociétés secrètes estudiantines aux États-Unis.
Par exemple, la Skull and Bones de Yale, fondée en 1832 à l’initiative de William Huntington, un étudiant américain ayant étudié en Allemagne, alors riche en sociétés secrètes estudiantines. Cette confrérie a compté parmi ses membres de nombreuses personnalités politiques américaines, telles que George W. Bush, dont le CEO de la Fondation éponyme, Kenneth A. Hersh, est un contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, tout comme John Kerry.
Les nouvelles recrues des Illuminés de Bavière pouvaient espérer accéder au grade de « Minerval », terme qui pourrait évoquer le culte rendu à la déesse gréco-romaine de la sagesse, Athéna, ou faire référence à la ville de Minerve dans le Languedoc-Roussillon, connue pour avoir été l’épicentre de l’hérésie cathare, elle-même influencée par le manichéisme.
Cela permettrait peut-être de mieux comprendre l’intérêt de personnalités de premier plan, comme Albert II, qui est un contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial pour cette région. L’homme d’affaire, Alexey Karakhan, passé par la THNK School, un partenariat public-privé visant à former de futurs leaders proche du Forum économique mondial, surf en tout cas sur la vague, comme en atteste l’ouverture de sa base de tourisme intitulée « Molodost », « pour jeunesse ». L’âge moyen de sa clientèle est de 40 ans, mais il entend toutefois organisé un évènement cet automne, intitulé « La jeunesse pour les adultes », « pour ceux qui ont 60, 65, 70, 75 ans ». Sur le site Internet de « Molodost », ont peut lire que la direction cherche « des points de contact avec l’héritage laissé en Altaï par Choukchine, Roerich, les alliés de Gengis Khan, les Scythes et même les contemporains des Néandertaliens, les Hommes de Denisova ». Les Scythes étaient un ensemble de peuples nomades iraniens d’Eurasie, répartis sur une vaste zone allant de l’Ukraine actuelle à l’Altaï, en passant par la Russie et le Kazakhstan, qui vécurent leur apogée entre le VIIe siècle av. J.-C. et le IIIe siècle av. J.-C. Selon Herodote, ils vénéraient un ensemble de dieux, dont l’un d’eux était l’équivalent d’Arès.
Karakhan nourrit en tout cas de grande ambitions, puisqu’il souhaiterait développer son concept « Molodost », dans « le monde entier ».