Apple se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente. Après plusieurs années d’accusations d’écoutes illégales à travers son assistant vocal Siri, la firme américaine doit maintenant faire face à une vague de protestations en France, après avoir déjà versé 95 millions de dollars de dommages et intérêts aux États-Unis pour clore un procès collectif. Le cœur du problème ? Des utilisateurs de produits Apple auraient été écoutés, parfois sans même avoir activé Siri, ce qui soulève des questions sur la protection de la vie privée et la transparence des données personnelles.
Dès 2019, un lanceur d’alerte avait révélé que des employés sous-traitants d’Apple avaient été chargés de retranscrire des enregistrements vocaux réalisés par Siri. Ces enregistrements auraient concerné des discussions privées sur des sujets personnels comme la religion, les opinions politiques, et d’autres données sensibles. Ce qui est reproché à Apple, c’est de ne pas avoir informé clairement ses utilisateurs que leurs conversations pouvaient être enregistrées à leur insu. Apple assurait que ces enregistrements étaient utilisés pour améliorer le service de Siri, mais cette pratique s’est avérée être un choc pour les consommateurs, particulièrement après les révélations du lanceur d’alerte.
La réponse d’Apple : des modifications, mais des doutes persistants
Depuis l’éclatement de la polémique, Apple a pris plusieurs mesures pour apaiser les critiques. La firme a modifié sa politique en déclarant qu’aucune discussion n’était désormais enregistrée sans le consentement des utilisateurs. Seuls ceux qui choisissent explicitement de participer au programme d’amélioration de Siri peuvent permettre à Apple d’analyser leurs conversations. Dans son communiqué, Apple a également souligné que les données recueillies n’étaient jamais utilisées à des fins publicitaires, ni revendues à des tiers. Toutefois, la transparence du géant américain reste mise en question, car de nombreux consommateurs continuent de se méfier de la gestion de leurs informations personnelles.
En France : l’action collective s’intensifie
Alors que la Ligue des droits de l’Homme a déposé plainte pour atteinte à la vie privée en février 2025, une action collective a été lancée début mai 2025 en France. Le groupe de plaignants, organisé par l’avocat Julien Bayou, ancien secrétaire national des écologistes et deux avocates du cabinet Phaos, vise à obtenir justice pour les utilisateurs d’Apple qui se sentent victimes de cette atteinte à leur vie privée. L’objectif est d’exiger des indemnisations plus substantielles que les 20 dollars par plaignant accordés aux États-Unis.
Les avocats affirment que, selon leurs estimations, quatre millions de personnes pourraient avoir été affectées en France. Cette action permet aux utilisateurs d’appareils Apple (iPhone, iPad, Apple Watch, Mac, etc.) de moins de 10 ans de rejoindre gratuitement la procédure via un site dédié, ecoutesabusives.fr. Les plaignants doivent fournir leurs informations personnelles et la preuve de la possession d’un appareil Apple pour participer.
Une procédure en cours : le remboursement des appareils et des indemnités supplémentaires
Les avocats demandent à Apple le remboursement de chaque appareil concerné, avec une limite de cinq appareils par personne, bien au-delà des compensations financières accordées dans le cadre du règlement américain. Par ailleurs, des indemnités supplémentaires pourraient être demandées, notamment pour les victimes dont les professions impliquent un haut degré de confidentialité, comme les médecins ou les travailleurs sociaux. Les avocats justifient leur demande en insistant sur le préjudice moral qu’entraîne la crainte que des données sensibles aient été collectées et utilisées de manière inappropriée, ce qui est désormais reconnu par la Cour de justice européenne.
Le droit européen et la protection des données
L’argument juridique repose également sur le respect des normes européennes relatives à la protection des données. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) impose aux entreprises de recueillir un consentement éclairé des utilisateurs avant de traiter leurs données personnelles. En l’absence d’un consentement explicite et d’une information claire de la part d’Apple, les avocats considèrent qu’une violation de la loi a été commise. Le droit européen protège les consommateurs et leurs informations personnelles, et cette action collective vise à rappeler à Apple qu’il doit respecter ces régulations strictes.
Source : Le Parisien.