En multipliant les ingérences dans l’économie au nom du “patriotisme économique”, Donald Trump confond de plus en plus libre marché et interventionnisme d’État. Son approche, entre contrôle des prix et pressions sur les entreprises, rappelle à Greg Ip du Wall Street Journal un capitalisme à la chinoise — voire certaines idées des socialistes américains qu’il dénonce.
Donald Trump aime se présenter comme le défenseur du capitalisme américain, champion des entrepreneurs et du marché libre face aux “dérives socialistes”. Pourtant, à en croire un éditorial du Wall Street Journal, le président républicain pratique lui-même un dirigisme économique qui brouille les lignes entre les deux modèles.
L’exemple le plus frappant ? Le lancement de la plateforme fédérale “TrumpRx”, annoncée le 30 septembre. Ce site, censé permettre aux Américains d’acheter des médicaments à prix réduit, s’inscrit dans une logique de contrôle indirect des prix — une approche que Trump reproche pourtant à la gauche démocrate.
“TrumpRx ressemble davantage à une épicerie publique de médicaments qu’à une initiative capitaliste”, ironise le chroniqueur du WSJ.
Trump, Mamdani : deux visions, une même méthode
Pour le journal économique, Trump et Zohran Mamdani, candidat socialiste à la mairie de New York, partagent un même réflexe : vouloir forcer la main aux entreprises privées. Mamdani souhaite encadrer les loyers new-yorkais et créer des commerces municipaux, tandis que Trump a négocié directement avec Pfizer pour obtenir des baisses de prix, promettant en échange des exemptions de droits de douane.
Le président n’en est pas à sa première intervention du genre. Ces dernières années, il a fait pression sur Apple, Coca-Cola ou encore ABC, allant jusqu’à menacer certaines entreprises de perdre leur licence ou d’être surtaxées.
“Trump se voit en arbitre suprême de l’économie américaine — un rôle habituellement réservé aux régimes de capitalisme d’État”, note le Wall Street Journal.
Du capitalisme d’État made in USA
Sous Trump, la frontière entre le capitalisme de marché et le capitalisme d’État devient de plus en plus poreuse., selon Ip. Il souligne que le gouvernement a récemment pris des participations dans la société minière Lithium Americas, modifiant les conditions d’un prêt fédéral pour soutenir son projet dans le Nevada. Une méthode que le quotidien compare à celle de la Chine ou de la Russie, où l’État se mêle étroitement des affaires des entreprises privées.
Cette stratégie, très populaire auprès de l’électorat “America First”, permet au président de revendiquer la défense des travailleurs américains tout en conservant un vernis nationaliste. Mais elle réduit la liberté économique chère aux conservateurs classiques.
Entre pragmatisme et populisme économique
Trump justifie ses interventions par la protection du pouvoir d’achat et la lutte contre les abus des multinationales, notamment pharmaceutiques. “Les Américains ne doivent pas payer plus que les autres pays pour les mêmes médicaments”, a-t-il déclaré en présentant TrumpRx.
Mais pour ses détracteurs, ce mélange d’autoritarisme économique et de marketing politique mine la crédibilité du capitalisme américain.
“Trump n’est ni socialiste ni libéral. Il est simplement convaincu que tout fonctionne mieux quand c’est lui qui décide”, conclut l’éditorial du Wall Street Journal.