Le Land du Schleswig-Holstein a finalisé sa migration vers des logiciels libres, abandonnant Microsoft Exchange et Outlook au profit d’Open-Xchange et Thunderbird. Une première à cette échelle, saluée comme un tournant stratégique pour la souveraineté numérique européenne.
Mission accomplie. Après six mois d’un chantier titanesque, le Schleswig-Holstein, land du nord de l’Allemagne, a officiellement rompu avec les solutions Microsoft. Les autorités régionales ont annoncé, mercredi 15 octobre, la migration de 40 000 comptes et de plus de 100 millions de courriels vers les plateformes Open-Xchange et Mozilla Thunderbird. Près de 30 000 agents publics — de la chancellerie d’État aux services de police — sont désormais équipés de ces outils open source.
« Nous sommes de véritables pionniers. Il n’existe quasiment aucun projet comparable dans le monde », a déclaré Dirk Schrödter, ministre de la Numérisation et chef de la chancellerie d’État, avant de conclure par un symbolique : « Mission accomplie ! »
Cette bascule s’inscrit dans une stratégie amorcée dès 2021, baptisée « Open Innovation et Open Source », visant à libérer l’administration allemande de sa dépendance aux logiciels américains. Après avoir remplacé Microsoft Office par LibreOffice, le Land poursuit désormais la désinstallation complète des produits Microsoft de ses infrastructures.
L’objectif est clair : bâtir un poste de travail souverain, reposant sur des solutions libres et hébergées localement. Les prochains chantiers sont déjà identifiés : remplacer SharePoint par Nextcloud, basculer Windows vers Linux, et déployer OpenTalk pour la visioconférence. Même la téléphonie publique doit à terme passer sous logiciel libre.
Cette transition, présentée comme un acte de souveraineté numérique, va bien au-delà des considérations budgétaires. Elle traduit la volonté de garder le contrôle sur les données publiques, sans dépendre de serveurs hébergés outre-Atlantique et soumis au Cloud Act américain.
Le mouvement gagne du terrain en Europe. En France, la région Île-de-France a annoncé la fin de sa dépendance aux solutions Microsoft dès la rentrée 2025. L’École polytechnique, elle, a suspendu sa migration vers Microsoft 365 après une mobilisation interne jugée historique. D’autres institutions suivent le pas : la ville de Lyon, l’armée autrichienneou encore la gendarmerie française, qui exploite déjà 100 000 postes sous Linux GendBuntu.
Cette vague européenne marque une rupture avec les pratiques du passé. Après l’échec du projet Linux à Munich en 2013, nombre d’observateurs doutaient de la viabilité du tout-libre dans l’administration. Mais cette fois, les enjeux politiques et stratégiques semblent primer sur les contraintes techniques.
En réussissant sa migration intégrale, le Schleswig-Holstein prouve qu’un modèle numérique indépendant des géants américains est possible. Une réussite qui, selon les experts, pourrait servir de modèle de référence pour les autres États européens désireux de reconquérir leur autonomie numérique.
Sources :
La Tribune – Le Schleswig-Holstein rompt avec Microsoft et migre vers le logiciel libre – lien
Le Monde Informatique – L’Allemagne dit adieu à Microsoft pour ses administrations publiques – lien
Der Spiegel – Schleswig-Holstein ersetzt Microsoft durch Open Source: „Mission accomplished“ – lien