Réunis à Istanbul le 3 novembre, les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans ont discuté de l’avenir du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas. Sous l’impulsion d’Hakan Fidan, la Turquie s’impose peu à peu comme un acteur diplomatique incontournable du dossier gazaoui, au carrefour des influences américaines et moyen-orientales.
Lundi 3 novembre, Istanbul s’est transformée en centre diplomatique régional. Sous la houlette du ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, les représentants du Pakistan, de l’Indonésie, du Qatar, des Émirats arabes unis, de l’Arabie saoudite et de la Jordanie se sont retrouvés pour discuter d’un cessez-le-feu vacillant entre Israël et le Hamas. Ce sommet, organisé à l’initiative d’Ankara, consacre le retour de la Turquie comme médiatrice dans le conflit israélo-palestinien, un rôle qu’elle revendique depuis plusieurs années sans parvenir jusque-là à s’imposer.
La position turque s’est récemment renforcée grâce aux relations pragmatiques que le président Recep Tayyip Erdogan entretient avec son homologue américain Donald Trump. Cette proximité, paradoxale au regard de leurs divergences passées, offre à Ankara un levier d’influence considérable dans les discussions autour de Gaza.
Selon la BBC Türkçe, Hakan Fidan a profité de la réunion pour dénoncer les « violations du cessez-le-feu » par l’armée israélienne, tout en fustigeant les blocages à l’acheminement de l’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne. Ces propos, mesurés mais fermes, s’inscrivent dans la continuité d’une ligne diplomatique turque oscillant entre défense du Hamas et volonté d’être reconnue comme intermédiaire légitime par les grandes puissances.
L’absence remarquée de l’Égypte, pourtant acteur historique du dossier, a suscité de nombreuses interprétations. Officiellement liée à des contraintes d’agenda, elle reflète surtout, selon le quotidien Yeni Safak, le malaise du Caire face à la montée en puissance d’Ankara dans la médiation régionale. Le média pro-gouvernemental souligne que des divergences profondes persistent entre pays arabes quant à l’avenir de l’administration de Gaza.
La Turquie, de son côté, n’exclut pas une participation militaire dans le cadre d’une future force internationale chargée de la coordination et du désarmement du Hamas. « Nous devons d’abord connaître le contenu exact de la mission », a précisé Hakan Fidan, cité par Milliyet, tout en admettant que cette option suscite l’opposition d’Israël, farouchement hostile à toute présence turque sur le terrain.
Fait notable, le Hamas aurait informé Ankara de sa disposition à transférer le pouvoir dans la bande de Gaza à un comité de technocrates palestiniens, une annonce relayée par Al-Monitor. Si cette ouverture reste symbolique, elle illustre le poids croissant de la diplomatie turque auprès du mouvement islamiste.
Pourtant, ce regain d’influence ne fait pas l’unanimité à Ankara. Une éditorialiste du média d’opposition Medyascope juge que « le Hamas doit accepter la défaite » et critique la complaisance des médias pro-gouvernementaux à l’égard du mouvement. Elle reconnaît néanmoins la « maîtrise et le sang-froid » de la politique étrangère turque sur ce dossier, saluant un équilibre fragile entre fermeté rhétorique et réalisme stratégique.
Ankara espère désormais consolider cette position au sein d’un échiquier régional instable, où la diplomatie se joue autant sur le terrain militaire que dans les salons feutrés du Bosphore.
Sources :
Courrier international – « Israël-Hamas. Avec une réunion sur Gaza à Istanbul, la Turquie soigne son rôle de médiateur » – 4 novembre 2025 – courrierinternational.com
BBC Türkçe – compte rendu diplomatique sur la réunion d’Istanbul, novembre 2025
Yeni Safak – analyse sur les rivalités régionales, novembre 2025
Milliyet – déclarations d’Hakan Fidan, novembre 2025
Al-Monitor – information sur les discussions entre la Turquie et le Hamas, novembre 2025
Medyascope – tribune d’opinion sur la diplomatie turque, novembre 2025