L’Organisation des Nations unies a dénoncé les frappes aériennes américaines menées dans les Caraïbes et le Pacifique contre des navires accusés de narcotrafic. Qualifiant ces attaques d’« exécutions extrajudiciaires », le Haut-Commissariat aux droits de l’homme appelle les États-Unis à y mettre fin et à rendre des comptes sur les victimes.

La tension monte entre Washington et les institutions internationales. Vendredi 31 octobre, le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a publiquement sommé les États-Unis de cesser leurs frappes aériennes menées depuis septembre dans les Caraïbes et le Pacifique contre des embarcations soupçonnées de trafic de drogue. Dans un communiqué, l’ONU qualifie ces opérations de « violations graves du droit international » et d’« exécutions extrajudiciaires », rappelant que le recours à la force létale ne peut être justifié qu’en dernier ressort, face à une menace imminente.

Selon les chiffres fournis par le gouvernement américain, quinze attaques auraient été menées en quelques semaines, causant la mort de 62 personnes. Washington affirme que ces cibles étaient impliquées dans des réseaux de narcotrafic transnational, sans pour autant fournir de preuves concrètes. Des spécialistes du droit international contestent la légalité de ces frappes, menées pour certaines dans des eaux internationales, où aucune juridiction nationale ne permet d’intervenir militairement sans mandat international.

« Ces attaques – et leur coût humain croissant – sont inacceptables », a déclaré Volker Türk, dénonçant une militarisation croissante de la lutte antidrogue. Il rappelle que « la lutte contre le trafic de stupéfiants relève avant tout du maintien de l’ordre, pas d’une logique de guerre ». Sa porte-parole, Ravina Shamdasani, a insisté lors d’une conférence de presse à Genève : « La responsabilité incombe à l’État. Les États-Unis ont le devoir de mener des enquêtes rapides, indépendantes et transparentes sur ces attaques. »

Le gouvernement Trump justifie pourtant cette campagne militaire par la nécessité de combattre ce qu’il qualifie de « narco-terrorisme », assimilant les cartels à des groupes armés non étatiques. Cette rhétorique, déjà employée lors de sa précédente présidence, resurgit dans un contexte de tensions croissantes avec le Venezuela. Donald Trump accuse en effet Nicolás Maduro d’être à la tête d’un régime impliqué dans le trafic de drogue, une accusation rejetée avec virulence par Caracas, qui y voit une stratégie de déstabilisation politique.

Cette confrontation directe avec l’ONU s’inscrit dans une escalade régionale préoccupante. Quelques jours avant cette mise en garde, un avion militaire russe lié à la milice Wagner avait atterri à Caracas en réponse à un appel à l’aide de Nicolás Maduro. Ce dernier cherche à renforcer son arsenal militaire avec l’appui de la Russie, de la Chine et de l’Iran, estimant que les opérations américaines constituent une menace directe contre la souveraineté du Venezuela.

Pour l’ONU, les récentes frappes américaines rappellent des précédents controversés, notamment les opérations de drones menées au Moyen-Orient sans autorisation onusienne. Plusieurs ONG, dont Human Rights Watch et Amnesty International, ont déjà réclamé l’ouverture d’une enquête internationale indépendante.

Au-delà de la question vénézuélienne, ce bras de fer entre Washington et Genève souligne un tournant inquiétant : le glissement du discours américain vers une justification de la force militaire dans des opérations de police internationale, un terrain où les frontières entre justice et exécution sommaire deviennent floues.

Sources :

Valeurs Actuelles – « Frappes anti-drogue : l’ONU accuse Donald Trump de violences extrajudiciaires et le somme de rendre des comptes » – 2 novembre 2025

Ouest-France – « L’ONU demande aux États-Unis d’arrêter les frappes aériennes dans les Caraïbes » – 31 octobre 2025