Sous les projecteurs d’un concert aux allures de meeting politique, Javier Milei a une nouvelle fois brouillé les frontières entre politique et spectacle. Lundi 6 octobre, le président argentin, vêtu de cuir noir, est monté sur scène devant 15.000 partisans à Buenos Aires pour chanter et présenter son nouveau livre, alors que son pouvoir vacille et que l’économie reste en crise.
Ce lundi 6 octobre, Buenos Aires a vibré au rythme du hard rock et des slogans libertariens. Dans une salle comble, le président Javier Milei, figure controversée de la droite ultralibérale argentine, a mêlé concert, meeting et autopromotion dans un show aussi inattendu que calculé. Devant près de 15.000 personnes habillées aux couleurs violettes de son parti La Libertad Avanza (LLA), le chef de l’État a fait une entrée théâtrale, porté par les accords d’un tube argentin qui débute par un rugissement : « Bonjour à tous, je suis le lion ! ».
De cuir noir vêtu, Milei a rejoint la scène en traversant une foule enthousiaste, majoritairement jeune, avant de s’emparer du micro pour interpréter, avec ce qu’il appelle « le Groupe présidentiel », quelques morceaux rageurs. Deux de ses amis députés accompagnaient le président-musicien dans cette performance mêlant rock, politique et culte de la personnalité. « Libertad, libertad ! » scandait la foule, galvanisée par un leader qui, entre deux chansons, s’est permis quelques piques contre Cristina Kirchner, l’ancienne présidente péroniste aujourd’hui assignée à résidence.
L’événement, à mi-chemin entre spectacle et stratégie de reconquête, marquait le lancement de son quatorzième ouvrage, La construction du miracle : le cas argentin. Ce livre de 573 pages, en grande partie composé de ses propres discours, compile les thématiques chères à Milei : le combat contre l’État, la foi dans le marché et une dimension quasi mystique de sa mission politique. Sur la couverture, une photo devenue symbole : l’économiste-président brandissant une tronçonneuse gravée de sa devise fétiche, Las fuerzas del cielo – les forces du ciel.
Mais derrière l’apparat scénique, le contexte demeure tendu. L’économie argentine, bien que sortie d’une inflation galopante de plus de 200 % pour retomber autour de 33 % en rythme annuel, reste exsangue. L’austérité imposée par le gouvernement a fait plonger l’emploi et le pouvoir d’achat, tandis que le peso continue de souffrir sur les marchés. Les récentes élections régionales, défavorables à son parti, ont accentué la défiance. En réponse, Milei a appelé ses partisans à « ne pas baisser les bras » avant les législatives du 26 octobre, qui décideront de sa capacité à gouverner jusqu’en 2027.
« L’opposition a gagné un round, mais pas la bataille », a-t-il lancé, dans une mise en scène rappelant ses campagnes de 2023, lorsqu’il promettait de “ scier ” la bureaucratie d’État. Pourtant, dans la rue, la fracture est visible. À quelques mètres du meeting, des opposants de gauche ont affronté des partisans du président, sous la surveillance d’un dispositif policier conséquent. Deux personnes ont été interpellées, selon l’AFP.
Pendant ce temps, les scandales rattrapent les proches du président. Sa sœur Karina, pilier de son entourage, est citée dans plusieurs affaires de favoritisme, et le député José Luis Espert a récemment dû renoncer à sa candidature après des accusations de financement douteux. Pour beaucoup, le rock et la mise en scène grandiloquente ne suffisent plus à masquer les fissures d’un pouvoir qui s’essouffle.
Sources :
AFP – « Le président argentin Javier Milei est monté sur scène pour chanter » – [Lien AFP original non précisé dans l’extrait]