Dans un discours lu par son conseiller André Azoulay à Marrakech lors du Forum Ibrahim sur la gouvernance, le roi Mohammed VI a dévoilé une vision stratégique audacieuse pour l’avenir du continent africain. Quatre axes pour sortir de la dépendance, stimuler la croissance interne, et refonder les relations internationales.
Le 1er juin 2025, lors de l’édition 2025 du Forum Ibrahim sur la gouvernance, tenu à Marrakech sous son haut patronage, le roi Mohammed VI a livré ce que beaucoup qualifient désormais de discours fondateur. Ce message est un appel à l’autonomie, à la solidarité sud-sud et à la réforme du système financier mondial.
Un constat clair sur la marginalisation économique de l’Afrique
Mohammed VI pointe du doigt les failles structurelles du développement du continent : l’Afrique ne représente que 3 % du commerce mondial, et ses échanges internes plafonnent à 16 % – contre 60 % en Europe. Une réalité qu’il refuse d’accepter.
« L’Afrique ne pourra pas se développer sans financement adapté à ses besoins. »
Le souverain marocain lie souveraineté politique et souveraineté économique, appelant à rompre avec les modèles d’aide publique au développement, jugés lents, conditionnés et générateurs de dette.
Les 4 axes d’une doctrine africaine du développement
Dans son discours, le roi Mohammed VI a articulé sa vision autour de quatre axes stratégiques clairs pour une croissance durable, inclusive et endogène.
1. Financer le développement par les ressources africaines
Il s’agit de mobiliser davantage les ressources domestiques, d’innover en matière de mécanismes de financement (diaspora, fonds souverains, partenariats publics-privés), et de sortir de la dépendance à l’aide extérieure. Le Fonds Mohammed VI pour l’Investissement et Casablanca Finance City en sont des exemples concrets.
2. Créer un climat propice à l’investissement
Mohammed VI appelle à des institutions fortes, transparentes et efficaces, capables de protéger les investisseurs et de stimuler la création d’emplois. Une gouvernance rigoureuse est selon lui indispensable pour restaurer la confiance des partenaires privés.
3. Activer l’intégration économique régionale
Le roi salue l’entrée en vigueur de la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf) comme un tournant majeur. Objectif : 1,3 milliard de consommateurs réunis dans un marché unique, des chaînes de valeur intra-africaines, et une capacité accrue à peser sur la scène mondiale.
4. Valoriser localement les ressources naturelles
Alors que l’Afrique détient 40 % des réserves mondiales de matières premières, Mohammed VI plaide pour l’arrêt des exportations de ressources brutes au profit de la transformation locale, créatrice d’emplois et de valeur ajoutée sur le continent.
Le Maroc en vitrine du modèle panafricain
Le discours royal s’accompagne d’exemples concrets de leadership africain. Parmi les projets structurants pilotés par le Maroc : le Gazoduc Atlantique Nigeria-Maroc ; l’Initiative Atlantique pour le Sahel ; le développement des énergies renouvelables et la promotion d’une agriculture durable.
Le Maroc entend ainsi se positionner comme catalyseur de partenariats Sud-Sud, dans un esprit de coopération africaine résolue.
Appel à la réforme du système financier mondial
Mohammed VI ne s’adresse pas qu’à l’Afrique. Il interpelle aussi la communauté internationale, appelant à une réforme de l’architecture financière globale : accès équitable au crédit ; fin des frais abusifs sur les transferts des diasporas ; taux d’intérêt adaptés aux réalités africaines et meilleure représentation du continent dans les institutions mondiales
Ce message intervient alors que se prépare la 4e Conférence Internationale sur le Financement du Développement, prévue à Séville.
« Le développement ne se décrète pas, il se construit par des politiques ambitieuses, par l’investissement dans le capital humain et par une gouvernance économique rigoureuse. »
Une vision politique ambitieuse, une Afrique maîtresse de son destin
Le discours du roi Mohammed VI dépasse le simple appel à l’autonomie financière. Il représente une véritable feuille de route géoéconomique, qui vise à réhabiliter l’Afrique comme acteur stratégique, et non plus comme simple spectateur de l’ordre mondial.
Source : APA News.