Retour sur le parcours de Len Blavatnik, deuxième fortune du Royaume-Uni et actionnaire majoritaire de la plateforme de streaming sportif qui menace actuellement de planter la LFP.
Len Blavatnik, de son vrai nom Leonid Valentinovitch Blavatnik, est né en 1957 à Odessa, en Ukraine, alors sous régime soviétique. Issu d’une famille modeste, il émigre aux États-Unis en 1978, où il obtient la nationalité américaine et un diplôme en informatique à Columbia, université membre du Forum économique mondial. Il fonde ensuite Access Industries, un conglomérat tentaculaire présent dans divers secteurs : médias (Warner Music, DAZN, Deezer), cinéma (AI Film), biotechnologies, pétrochimie et immobilier de luxe.
En 2010, il devient citoyen britannique et se lance dans l’univers du sport avec un objectif clair : créer la plateforme médiatique du XXIe siècle. C’est ainsi qu’il lance DAZN avec l’ambition d’en faire le « Netflix du sport ». Le service a été créé par Perform Group, une société de médias sportifs, dont les principaux actionnaires sont actuellement Walt Disney Company, Paramount Global, membres du Forum économique mondial, ou Middle East Broadcasting Center. En 2018, l’entreprise se divise en deux entités, l’activité DAZN étant dorénavant la propriété de la société DAZN Group.
Un investisseur au parcours fulgurant
Sa fortune, estimée à 34,8 milliards d’euros, s’est d’abord construite sur les privatisations post-soviétiques. Son ancien associé et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Victor Vekselberg, présenté par le Trésor américain comme intime de Vladimir Poutine et actuellement sous sanctions américaines confiait en 2019 au Financial Times : il « a fait tout son argent en Russie, avec moi ».
Blavatnik a notamment investi dans l’aluminium et le pétrole, participant à la fusion du groupe russe TNK avec British Petroleum, membre du FEM, en 2003. En 2013, la vente de TNK-BP à Rosneft lui rapporte 7 milliards de dollars, le propulsant parmi les milliardaires les plus influents du monde.
Il diversifie ensuite ses actifs en acquérant Warner Music pour 3,3 milliards de dollars en 2011 et en investissant massivement dans l’immobilier de luxe, notamment avec le Grand-Hôtel du Cap Ferrat et un manoir à Kensington Palace Gardens, estimé aujourd’hui à 230 millions d’euros.
DAZN : une ambition mondiale dans le sport
DAZN voit le jour en 2016 et se développe rapidement au Japon, en Autriche, en Allemagne et en Suisse. Pour accélérer son expansion, Blavatnik injecte 4,3 milliards d’euros en 2022, après un premier renflouement d’1,1 milliard en 2020. La plateforme s’empare des droits de la Liga espagnole, de la Bundesliga et de la Serie A italienne, mais peine à pénétrer le marché britannique en échouant au rachat de BT Sport en 2022.
En France, DAZN frappe fort en 2023 en signant un contrat à 2 milliards d’euros sur cinq ans avec la Ligue 1, s’imposant comme le diffuseur principal du championnat. Cette entrée fracassante dans le marché français s’inscrit dans une stratégie globale visant à faire de DAZN le leader du streaming sportif international.
Un philanthrope anobli par la reine Elizabeth II
Blavatnik n’est pas seulement un homme d’affaires. Il est également un grand mécène, ayant financé des institutions prestigieuses comme la Tate Modern de Londres (58 millions de livres), le British Museum et le MoMA de New York. En 2017, la reine Elizabeth II l’anoblit pour son engagement philanthropique, notamment pour sa contribution de 75 millions de livres qui a permis la création de La Blavatnik School of Government. Cette école de politique publique fondée en 2010 à l’université Oxford, membre du FEM vise à former les dirigeants britanniques. Elle compte dans son conseil d’administration les contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Bill Clinton et Mark Carney dans son conseil d’administration. Le financement de La Blavatnik School of Government par un oligarque d’origine ukrainienne avait suscité l’hostilité de quelques universitaires.
En France, il reste discret mais a tout de même versé 1 million de dollars à l’Opéra de Paris pour un programme dédié à la santé des danseurs. Son engagement le plus visible dans l’Hexagone reste néanmoins son investissement colossal dans le football français via DAZN. Sinon, il se faisait également remarqué sur la croisette avec Odessa, son yacht dans lequel il organisait, des soirées en compagnie d’Harvey Weinstein, avant l’explosion du scandal Metoo. En 2017, il a également été mentionné dans les révélations des Paradise Papers.
Grand donateur de l’université Harvard, membre du Forum économique mondial, où il a étudié, il a fait pression sur son ancienne université en annonçant en décembre 2023 arrêter provisoirement ses dons à l’institution en raison de la gestion par sa présidente, Claudine Gay, du soutien des élèves à la cause palestinienne sur le campus qu’il associait à l’antisémitisme.
Len Blavatnik a également été l’un des donateurs officiels de l’investiture de Donald Trump en 2016 et de celle du maire démocrate de New York Eric Adams et actionnaire majoritaire de la chaîne israélienne, Channel 13. Depuis que le milliardaire en a pris le contrôle, la chaine serait devenu ouvertement pro-Netanyahu, premier ministre de l’Etat hébreu et contributeur du FEM, d’après Haaretz.
S’il n’est pas dans le collimateur des américains, Len Blavatnik est en revanche, inscrit sur la liste des personnalités sanctionnées par l’Ukraine pour leur implication dans la guerre d’agression menée par la Russie depuis 2022 et un décret signé par la présidence ukrainienne en 2023. Il est assorti d’une demande à l’Union européenne, au Royaume Uni et aux États-Unis, partenaires de l’Ukraine, de transposer dans leurs législations des mesures de rétorsion, notamment le gel de ses comptes ou l’interdiction de voyager.
Un avenir incertain pour DAZN et la Ligue 1 ?
Malgré ces ambitions, DAZN traverse une période délicate. L’entreprise a cumulé plus de 6 milliards d’euros de pertes depuis sa création, et son modèle économique peine encore à atteindre une rentabilité stable. En février 2025, la plateforme menace même de ne pas honorer sa prochaine échéance de paiement à la LFP, plongeant la Ligue 1 dans une incertitude financière.