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Nouvelle-Calédonie : La réforme du corps électoral ravive les tensions

L’examen du projet de loi constitutionnelle réformant le corps électoral en Nouvelle-Calédonie a provoqué une flambée de violence, rappelant les heures sombres de l’histoire de l’archipel. Ces événements tragiques ont mis en lumière les profondes inégalités persistantes et la méfiance entre les communautés exacerbées par la méthode employée par le gouvernement, qui semblait se préparer à une épreuve de force.

Les 13 et 14 mai, la Nouvelle-Calédonie a été le théâtre d’émeutes violentes alors que le projet de loi constitutionnelle était débattu à l’Assemblée nationale. Deux personnes ont été tuées, et un couvre-feu a été instauré hier soir. Les habitants, dans un climat de peur, ont commencé à former des milices pour protéger leurs biens.

Cette insurrection, menée par de jeunes émeutiers hors du contrôle des chefs indépendantistes, survient quarante ans après les événements tragiques de la grotte d’Ouvéa en 1988, où dix-neuf Kanak et deux militaires avaient perdu la vie. À l’époque, comme aujourd’hui, la définition du corps électoral était au cœur des tensions entre loyalistes et indépendantistes.

La Réforme du corps électoral

La révision du corps électoral, qui marque la fin du cycle ouvert par l’accord de Nouméa de 1998, est un sujet délicat. Jusqu’à présent, seuls ceux inscrits sur les listes électorales avant cet accord pouvaient voter, excluant près d’un électeur sur cinq aujourd’hui. Le projet de loi vise à corriger cette inégalité en ouvrant le vote à tous les natifs de l’archipel et aux résidents de plus de dix ans.

Réactions et Critiques

Le président Français et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Emmanuel Macron, a confié la gestion de ce dossier sensible au ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, une décision mal perçue, alors que c’était traditionnellement les premier ministres qui se chargeaient du dossier Calédonien depuis Michel Rocard. Marie Toussaint, tête de liste d’Europe Ecologie-Les Verts aux élections européennes 2024, a d’ailleurs appelé sur France 2, le Premier ministre, Gabriel Attal, à piloter « lui-même » les négociations. La nomination de Sonia Backès, présidente non indépendantiste de la province Sud, comme secrétaire d’État en 2022, et la désignation de Nicolas Metzdorf, un autre élu loyaliste, comme rapporteur du projet, avaient déjà ajouté à la suspicion des Kanaks et exacerbé les tensions.

L’adoption d’une réforme qui ravive les tenions

Dans la nuit, les députés ont adopté le projet de loi constitutionnelle élargissant le corps électoral en Nouvelle-Calédonie, qui vise à asseoir une base légale pour les prochaines élections provinciales prévues en 2025. Toutefois, cette réforme qui ne s’accompagne pas d’un large accord englobant les aspects économiques, sociaux et institutionnels, mets de l’huile sur le feu.

Le communiqué de l’Union syndicale Solidaires

Dans un communiqué publié hier, l’Union syndicale Solidaires, évoquait un « processus dangereux pour l’avenir du peuple kanak ». « Les élus du congrès de Nouvelle Calédonie se sont réunis ce lundi 13 mai et sont parvenu à adopter, à la majorité, une résolution demandant le retrait de ce projet de loi sur le corps électoral. » Cette réforme constitutionnelle était présentée comme une « modification brutale de toute l’organisation de la vie démocratique de la Nouvelle-Calédonie », « une façon de favoriser la recolonisation du territoire et l’invisibilisation du peuple Kanak », selon Solidaires.

La méthode du gouvernement

En invitant les parties néo-calédoniennes à Paris pour relancer le dialogue et en précisant qu’il ne convoquerait pas le Congrès du Parlement pour adopter immédiatement la révision constitutionnelle, Emmanuel Macron, a semblé désavouer la méthode de fermeté de Gérald Darmanin, mais il semblerait que l’épreuve de force ait été décidé bien en amont.

La nomination au mois de janvier de Louis Le Franc, comme Haut-Commissaire de la République, sur proposition du ministre de l’Intérieur, pouvait laisser présumer l’intention du gouvernement d’aller au clash. Ancien Préfet de l’Oise, de 2017 à 2020, où il a géré le début de l’épidémie de la Covid, puis du Pas-de-Calais, où il s’est montré ferme sur la crise migratoire, Louis le Franc, a ensuite été directeur de cabinet de Caroline Cayeux, lorsqu’elle a occupé le poste de ministre des collectivités territoriales. Il déjà exercé en Nouvelle-Calédonie comme secrétaire général adjoint puis secrétaire général au haut-commissariat, de 2003 à 2006. Aujourd’hui, il affirme que l’« On s’engage tout droit dans une guerre civile ».

Le chef de l’Etat préside ce mercredi matin un conseil de défense et de sécurité consacré à la situation en Nouvelle-Calédonie. Le conseil des ministres, initialement programmé dans la matinée, se tiendra en milieu d’après-midi.

La droite et l’extrême droite appellent à l’état d’urgence

Les Républicains (LR) ont appelé à l’instauration de l’état d’urgence par le conseil des ministres et à la mobilisation de l’armée, soulignant l’insuffisance des forces de l’ordre actuelles. Olivier Marleix, président du groupe LR à l’Assemblée nationale, a également réclamé des assignations à résidence pour les individus les plus dangereux.

Sonia Backès avait déjà demandé l’état d’urgence mardi, affirmant qu’aucun dialogue ne pouvait avoir lieu dans une telle situation de désordre. Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, a appuyé cette demande sur Franceinfo. La cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, a également souligné sur X, la nécessité de proclamer l’état d’urgence, vu la gravité des violences en cours.

Le tribunal correctionnel de Nouméa a triplé ses effectifs afin de pouvoir traiter en temps réel les nombreuses gardes à vue effectuées par les services de police et de gendarmerie, tandis que l’Union calédonienne-Front de libération nationale kanak et socialiste (UC-FLNKS) et nationalistes, l’Union nationale pour l’indépendance (UNI), les loyalistes, le Rassemblement et l’Eveil océanien (EO) appellent, dans un communiqué commun, « la population, au calme et à la raison ».

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