Précédant la dynastie des Lamaizière, le travail des Dalgabio a profondément marqué la ville. A l’origine de la lignée, on trouve Pierre Antoine Dalgabio, qui voit le jour dans le Piémont vers 1748.

Il s’installe à Saint-Etienne en 1771. La ville n’est encore qu’une bourgade qui ne dépasse pas trente mille habitants. En 1790, il devient architecte de la ville. L’achat des propriétés du clergé par la municipalité offre la possibilité de tracer un nouvel axe Nord-Sud Roanne – Paris – Annonay – Méditerranée matérialisé par la grand’rue actuelle. En 1792, il conçoit le plan fondateur du Saint-Etienne moderne.
Prévoyant un lotissement sur l’emplacement des terrains des religieuses de Sainte-Catherine, il n’hésite pas faire à passer la voie principale (la nouvelle route de Roanne) à travers les bâtiments du couvent, le condamnant à la démolition. Par cette nouvelle route d’entrée dans la ville, Saint-Etienne est ainsi reliée directement à Paris, et projette déjà une route vers la Méditerranée.
Saint-Etienne est désormais orientée Nord-Sud. En quelques années, la ville aura fait un quart de tour… phénomène tout à fait particulier dans l’histoire de l’urbanisme. Désormais, dégagée de sa gangue rurale, la bourgade devient, en quelques décennies, le cœur d’une agglomération industrielle moderne.
La ville se développe alors le long du Furan, dont la force motrice fortement sollicitée est complétée par la machine à vapeur. Au XIXe siècle, tout l’urbanisme de la ville est modelé dans la logique de ce plan. Le second des Dalgabio se prénomme Jean-Michel. Il est né le 15 septembre 1788 dans un modeste bourg des Alpes piémontaises. Orphelin très jeune, il vient apprendre auprès de son oncle, Pierre Antoine, les rudiments de l’architecture.

Il complète sa formation en suivant les cours de Delespine à l’école des beaux-arts de Paris, et termine sa formation à l’académie des beaux-arts de Brera à Milan. Succédant à son oncle, il devient, en 1805, architecte de la ville. Sa collaboration avec Hippolyte Royet, qui occupa les fonctions de maire de 1819 à 1830 est exemplaire. D’abord, il poursuit l’œuvre de son oncle en ouvrant la route d’Annonay. Ensuite, il conçoit les plans de plusieurs bâtiments qui façonnent encore notre paysage. Deux sont particulièrement marquants :
– L’Hôtel de ville qui se présente comme un quadrilatère centré sur une cour à péristyle. Entre 1858 et 1864, la construction est complétée d’un dôme de 51 mètres de haut venant remplacer le campanile prévu par Dalgabio, et d’un perron.
– Le Palais de justice, édifice néo-classique, dont on peut encore admirer les colonnes « à la grecque ».
Et voilà comment deux architectes italiens ont grandement contribué à la structure du Saint-Etienne d’aujourd’hui. Jean-Michel est décédé en 1852. Quatre-vingts ans après l’arrivée de son oncle à Saint-Etienne, la bourgade s’est transformée en une ville de soixante mille habitants. L’oncle et le neveu méritaient bien de recevoir le nom d’un boulevard, entre la gare de Chateaucreux et la place Fourneyron.
Par Pierre Mazet pour gillescharles.info