Casino, Atos, Médias : L’empreinte croissante de Daniel Kretinsky en France facilitée par le Forum économique mondial ?

Daniel Kretinsky, magnat tchèque ayant bâti sa richesse sur les énergies fossiles, est devenu un acteur majeur du paysage médiatique français, suscitant des préoccupations démocratiques. Il est en passe d’acquérir Casino, Atos et sa filiale Eviden, experte en cybersécurité et supercalculateurs, essentiels pour la simulation d’essais nucléaires. Pour ces acquisitions, il est épaulé selon La Lettre, par Grégoire Chertok de Rothschild & Co, une entité du Groupe Edmond de Rothschild, associé au Forum économique mondial,  par laquelle est passé le président français et contributeur du FEM Emmanuel Macron. Concernant le rachat d’Atos, d’après le Canard enchainé, les sociétés de conseil Mc Kinsey et Boston Consulting, ainsi que les banques  BNP Paribas et JP Morgan se sont joints à la partie. Toutes ces entités font partie du Forum économique mondial. 

« C’est ‘le’ banquier star de Rothschild & Co. Après les plus gros deals de la place parisienne de ces 20 dernières années, Grégoire Chertok conseille Casino et Atos pour leur cession. Avec Kretinsky, il peut mener des négociations parfois très tendues », indique La Lettre sur X. 

Cependant, le succès de Chertok ne repose pas uniquement sur ses associations stratégiques. Au cœur de ses opérations se trouve une équipe soudée et expérimentée, souvent surnommée les « commandos » de Rothschild & Co, anciennement appelée Paris Orléans,une holding cotée à Euronext, spécialisée dans le conseil financier, la banque privée, la gestion d’actifs, le capital-investissement et la dette privée contrôlée par les branches française et anglaise de la famille Rothschild. Il convient de noter que le Groupe Edmond de Rothschild est affilié au Forum économique mondial. 

Selon La Lettre, Grégoire Chertok conseille donc Casino et Atos dans le cadre de leur cession à Daniel Kretinsky, mais comment se passe ses rachats ?

Le rachat de Casino 

Le groupe Casino a été placé en procédure de sauvegarde accélérée ce mercredi par le tribunal de commerce de Paris pour une durée minimale de deux mois. Cette décision vise à restructurer sa dette, qui s’élevait à 6,4 milliards d’euros à la fin de l’année 2022. Le groupe, employant 200 000 personnes à l’échelle mondiale, a été confronté à cette situation financière difficile, malgré la notoriété de ses enseignes comme Monoprix, Franprix ou Grupo de Acucar.

Jean-Charles Naouri, PDG du groupe Casino, a longtemps réussi à maintenir son entreprise à flot grâce à des stratégies financières audacieuses. Mais, cette fois-ci personne ne lui est venu en aide, L’Express, affirmait au mois de juin que Bruno Le Maire ne le prenait plus au téléphone et qu’il ne s’était même pas déplacé le 15 juin à Bercy au Ciri, le comité interministériel de restructuration industrielle, pour une première réunion de discussions entre les financiers du groupe et les créanciers pressés.

Alors que le milliardaire Tchèque tournait autour du groupe Casino depuis des mois, Jean-Charges Naouri a été rattrapé par la justice. « Parallèlement aux discussions sur la recapitalisation du groupe, une enquête préliminaire lancée par le Parquet national financier est en cours », rappelait L’Express. Pire, au mois de juin, le PDG de Casino, Jean-Charles Naouri, avait fait l’objet d’une nouvelle information judiciaire pour viol et violences conjugales. Son épouse avait déposé une première plainte en février 2022 pour des violences psychologiques, mais l’enquête avait été classée sans suite en août 2022 faute de preuves suffisantes.

Sur un plan personnel, Naouri est devenu de plus en plus isolé, évitant le monde extérieur et se méfiant des autres. Il a même écarté son fils Gabriel du groupe, qui après un séjour à l’étranger est revenu en France en 2020, avec son propre fonds d’investissement « dont, ironie de l’histoire, le milliardaire Daniel Kretinsky est actionnaire », dixit L’Express.

Le rachat d’Atos 

Le groupe Atos spécialisé en informatique et en cybersécurité a officialisé le 16 octobre la démission de son président Bertrand Meunier, qui a été remplacé par Jean-Pierre Mustier.

Cette démission intervient sur fond de mécontentement des actionnaires, particulièrement suite à l’annonce d’un projet de cession à l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky, qui a entrainé une baisse des couts de l’action Atos de 48%.

Selon le Canard Enchainé, « Quatre jours plus tôt, le fonds d’investissement Ciam avait porté plainte devant le parquet national financier après le fonds Alix AM pour « information fausse ou trompeuse » », dans le cadre de la vente à Kretinksy de la branche d’infogérance d’Atos et une prise de participation minoritaire de 7,5% dans sa filiale Eviden, qui recouvre notamment la cybersécurité et les supercalculateurs, ce qui n’est pas sans poser de question au niveau stratégique, car ces derniers permettent notamment la simulation d’essais nucléaires. Certains élus du groupe Les Républicains au Sénat envisagent d’ailleurs de demander une enquête parlementaire à ce sujet.

Dans les colonnes du Canard enchainé, Anne-Sophie d’Andalou, codirigeant de Ciam, affirme que « Ce projet n’a pas de sens » et qu’il « n’enrichît que les banquiers, avocats ou consultants qui conseillent la direction de l’entreprise ». 

Selon nos confrères, « Pour mener à bien son projet de scission, Atos aurait, selon plusieurs sources financières, dépensées aux alentours de 400 millions d’euros ».

Cette manne aurait profité au Cabinets de Boston Consulting Group et McKinsey, qui font parti du Forum économique mondial, le second étant même le sponsor stratégique de Davos 2O23. En plus de la Banque Rotchild, d’autres banques sont chargées de la restructuration financière. Il s’agit de la BNP Paribas et JP Morgan, qui font parti elles aussi du FEM et de Perella Weinberg Partners, dont le fondateur Joseph R. Perella est un contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial. 

Par ailleurs l’ancien PDG du groupe, Thierry Breton,  est accusé selon le Canard enchainé, « d’avoir fait grossir le groupe d’informatique à coups de rachats mal digérés » et de s’être « délesté de toutes ses actions pour la modeste somme de 45,7 millions d’euros », lorsqu’il a été nommé commissaire européen au marché intérieur le 1er décembre. Elles valaient alors 70 euros et n’en valent pas plus de 5 désormais. De plus, le groupe Atos, » a dû décaisser 20 millions d’euros pour assurer », la future retraite de Thierry Breton qui s’élèvera à « 711 000 euros pas an ». Edouard Philippe qui siégeait au comité d’administration n’a lui perçu « que », « 120 000 euros en 18 mois ». 

Mais qui est donc Daniel Krestinsky ? 

Daniel Křetínský est la 5e fortunes de Tchéquie, avec un capital estimé à 9,5 milliards de dollars. Après des études en France, il est devenu avocat puis homme d’affaires, et est proche du Premier ministre tchèque Mirek Topolanek. Fervent libéral, il soutient fermement l’OTAN et a été mentionné dans les Panama Papers.

En 2018, ses holdings avaient des liquidités totalisant 2,3 milliards d’euros. Il a fait fortune dans le secteur de l’énergie en prenant la présidence d’EPH (Energetický a průmyslový holding NDLR.), une entreprise spécialisée dans la production et la distribution d’électricité d’origine thermique, y compris à partir de centrales à charbon, dans plusieurs pays européens. Il a misé dessus estimant que la transition vers les énergies renouvelables en Europe prendra du temps. Křetínský a également investi dans des entreprises comme le grossiste allemand Metro et le groupe Fnac-Darty, dont il est devenu le principal actionnaire avec 25% des actions. Il est également président et copropriétaire du Sparta Prague et possède une partie du club anglais West Ham. Il ornerait aussi sur l’ASSE. En 2022, il a acquis 19% du groupe Royal Mail au Royaume-Uni et 25% de Post NL aux Pays-Bas.

De plus, Kretinsky, s’est imposé comme un élément incontournable du paysage médiatique tchèque mais également français.

En Tchéquie, il a racheté la filiale tchèque du groupe suisse Ringier en 2013, et a cofondé Czech News Center (CNC). En 2018, après avoir racheté au groupe Lagardère ses radios internationales en République Tchèque, Pologne, Slovaquie et Roumanie pour 73 millions d’euros, il s’est lancé dans le rachat de ses titres français comme Elle, Télé 7 Jours et Marianne.

Křetínský a progressivement étendu son empire médiatique en France, en prenant des parts chez TF1,  dans la Holding Le Nouveau Monde, qui possède Le Monde aux côtés de Pigasse et Xavier Niel, prêtant de l’argent à Libération, lançant la chaîne de télévision B SMART… Kretinsky est aussi en train de finaliser l’aquistion d’Editis, numéro deux français de l’édition au groupe Vivendi, de Vincent Bolloré.

Ce rachat avait suscité quelques inquiétudes du côté de l’Union européenne. Reporters sans frontière (RSF), s’est également inquiété concernant l’impact globale des acquisitions de Kretinsky sur la diversité des voix dans le paysage médiatique tchèque. En France, pendant l’entre-deux tours de l’élection présidentielle de 2022, la Société des rédacteurs du magazine Marianne a accusé Daniel Křetínský, d’avoir modifié la une du journal pour afficher un soutien à Emmanuel Macron, malgré ses promesses de respecter l’indépendance éditoriale des journalistes. La rédactrice en chef Natacha Polony avait nié ces affirmations.

Lors de l’entrée de Křetínský dans le capital du Monde, Emmanuel Macron a déclaré qu’il serait attentif à l’indépendance des journalistes, tout en soulignant qu’il n’avait pas d’objection à ce qu’un investisseur européen investisse dans les médias français.

Le rachat par le groupe EPH de Kretinsky des actifs français du groupe allemand Uniper20 est toutefois intervenu quelques semaines après la prise de capitale du Tchèque dans Le Nouveau Monde.

Selon le président de CMI France, Denis Olivennes, Křetínský ne s’attend pas à ce que ses médias génèrent autant de rentabilité que ses autres activités, mais il ne souhaite pas non plus perdre d’argent avec eux.

En 2018, le Tchèque a également mené un intense lobbying en faveur de la proposition de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique. Lors d’un entretien accordé aux Échos le 3 novembre, il avait justifié sa volonté d’investir dans Le Monde par son envie de lutter contre les GAFAMS. Les « conséquences des positions prises par les GAFAMS sont largement sous-estimées. La régulation du monde numérique nous échappe complètement, j’aimerai me battre pour un système plus juste » avait-il déclaré avant d’ajouter que la Tchéquie était « un territoire trop étroit (…) si on peut devenir un membre de la famille média en France, on sera plus puissant pour pousser ces idées ».

Par Grégory Fiori

 

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