Le triple jeu du Qatar

Suite à la médiation du Qatar, les otages américaines enlevées en Israël ont été libérées par le Hamas. Alors que le Qatar se positionne en médiateur clé au Moyen-Orient, son rôle complexe et ses relations ambivalentes avec certaines organisations, comme le Hamas posent question. 

Par Grégory Fiori

Les otages américaines, Judith Ranaan (59 ans) et Natalie (17 ans), ont été libérées vendredi par le Hamas suite à leur enlèvement le 7 octobre en Israël. Ayant la double nationalité israélo-américaine, elles étaient en Israël pour une célébration familiale.

« Le Qatar a joué un rôle décisif dans la libération de deux otages américains. Je tiens à saluer son engagement », annonçait dans la foulée sur X, le président Français et contributeur de l’Agenda 2030 du Forum économique mondial.

Les Brigades Ezzedine Al-Qassam, branche armée du Hamas, ont confirmé que leur libération avait été obtenue grâce à « une médiation du Qatar », pour des « raisons humanitaires et pour prouver au peuple américain et au monde que les affirmations de Biden et de son administration fasciste sont fausses et sans fondement ». Elles ont égalemenaffirmé dans un communiqué « travailler avec tous les médiateurs impliqués pour mettre en œuvre la décision du mouvement de clore le dossier des [otages] civils quand les circonstances sécuritaires le permettent ».

Le président américain et contributeur du Forum économique mondial, Joe Biden qui s’était rendu mercredi en Israël a a exprimé sa joie à l’annonce de leur libération et sa gratitude envers le Qatar et Israël pour leur « partenariat » dans cette opération. Majed Al-Ansari, porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères, a réitéré l’engagement du Qatar à résoudre la crise.

Le double jeu du Qatar

Alors que les militants du Hamas provoquaient la terreur dans le sud d’Israël, une vidéo circulait sur les réseaux sociaux montrant Ismaïl Haniyeh, leader du groupe palestinien, entouré de douze de ses collaborateurs, observant des images choquantes à la télé avant de s’arrêter pour un moment de prière, depuis son bureau climatisé à Doha. Le bureau politique du Hamas, sous la houlette d’Ismaïl Haniyeh, qui compte 15 membres a été déplacé en 2012 de Syrie au Qatar, une décision approuvée, voire en “coordination” avec le gouvernement américain, selon Bloomberg. 

Le Qatar, bien que désigné « allié majeur en dehors de l’OTAN » par les États-Unis, héberge ainsi le leader d’un groupe que les États-Unis classent comme organisation terroriste. Non loin de son lieu de séjour se situe la base aérienne d’Al-Udeid, la principale installation américaine au Moyen-Orient et le centre du Centcom, qui supervise les opérations militaires américaines dans cette zone.

Cette duplicité est mise en évidence par deux visites consécutives à Doha : celle d’Antony Blinken, secrétaire d’État américain, le 13 octobre, suivie par celle du ministre des Affaires étrangères iranien, Hossein Amir Abdollahian, le 15.

Selon le ministre des Affaires étrangères qatari et contributeur de l’Agenda 2030 du Forum économique mondial, Mohammed ben Abdulrahman Al Thani, cette décision avait pour objectif initial de faciliter la communication et d’instaurer une atmosphère paisible dans la région, plutôt que d’orchestrer des hostilités.

Le Qatar s’impose comme un médiateur

Le Qatar s’est solidement établi comme médiateur principal dans les affaires de libération d’otages au Moyen-Orient. En février 2020, les États-Unis et les talibans se sont assis à la table des négociations au Qatar pour discuter du retrait américain d’Afghanistan. Ce retrait a précédé la prise de Kaboul par les talibans en août 2021.

Lors du Forum économique mondial à Davis en 2022, l’émir du Qatar, Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, a prononcé un discours au cours duquel il a déclaré « qu’il était prêt à contribuer à tous les efforts internationaux et régionaux pour trouver une solution pacifique immédiate au conflit en Ukraine », selon ArabeNews.

Son rôle de médiateur s’est renforcé avec la libération de cinq Américains des geôles iraniennes en septembre. De plus, l’émirat a facilité un accord « en vertu duquel la Russie a restitué quatre enfants ukrainiens à leurs familles », rappelle The Messenger. 

Bien que le Qatar finance substantiellement le Hamas, la réaction israélienne du contributeur de l’Agenda 2030 du Forum économique Mondial, Benjamin Netanyahu, à l’égard de l’émirat est modérée. Selon Challenges, le Hamas qui « bénéficie de 30 millions de dollars mensuelles du Qatar, reçoit aussi une aide de la part de l’Iran ».

« Que les Qataris permettent à [des dirigeants du Hamas et à des Frères musulmans] de prendre le thé au Four Seasons et faire de longues promenades sur la corniche n’a rien de bien étonnant […], leur duplicité est source de pouvoir, d’influence et de prestige. Le problème est que Washington les laisse faire », ajoute Foreign Policy.

La présence de nombreux contributeur de l’Agenda 2030 au sein du clan Al Thani

Une autre dimension qui n’est pas évoquée par nos confrères, est la présence de nombreux contributeurs de l’Agenda 2030 du Forum économique au sein du clan Al Thani, dont Hamed Ben Khalifa Al Thani, le père de l’actuel émir, a pris le pouvoir suite à un coup d’État en 1995. Outre Mohammed ben Abdulrahman Al Thani, on peut citer le CEO de l’Investment Promotion Agency Qatar, le Sheikh Ali Alwaleed Al-Thani, ou encore le Directeur général du Qatar Leadership Center, Abdulla Bian Ali Al Thani.

Les scandales auxquels le Qatar est mêlé

En décembre 2022, l’affaire de corruption associée au Qatar au sein du Parlement européen, désignée par le terme « Qatargate » dans les médias, a vu le jour. Elle mettait en cause plusieurs membres du Parlement, notamment sa vice-présidente, Eva Kaïli, originaire de Grèce. Il est allégué qu’elle a accepté des sommes d’argent en échange de la promotion des intérêts qataris. Suite à des enquêtes menées par les autorités belges et italiennes, 1,5 million d’euros en espèces ont été découverts chez elle à Bruxelles, conduisant à son arrestation. Cette affaire a également conduit à la mise en lumière du « Marocgate », aboutissant à la détention d’Antonio Panzeri, déjà mentionné dans le contexte du Qatargate. Le Maroc est soupçonné d’avoir soudoyé des députés européens pour obtenir leur soutien sur diverses questions, dont les droits de l’homme et leurs ambitions territoriales au Sahara occidental.

Un autre Qatargate était passé aux oubliettes, avant de refaire surface récemment. En 2013, France Football avait mis en lumière un accord présumé entre le Qatar et la FIFA concernant l’attribution du mondial 2022 dans un rapport de 16 pages. Ce document faisait état d’une rencontre clandestine à l’Élysée le 23 novembre 2010, juste avant le vote de la FIFA, impliquant entre autres le prince qatari, Tamin bin Hamad al-Thani, le président de la FIFA Michel Platini, Sébastien Bazin, représentant de Colony Capital, qui possédait alors le PSG et le président Fraçais et contributeur de l’Agenda 2030 du Forum économique mondial Nicolas Sarkozy. Pour étayer ses affirmations, le magazine citait un email de Jérôme Valcke, de la FIFA, affirmant que le Qatar avait « acheté » la Coupe du Monde 2022. Valcke avait par la suite tenté de minimiser ses propos. L’article mentionnait également les propos de Guido Tognoni, un ancien membre de la FIFA, qui exprimait ses fortes suspicions concernant les votes en faveur du Qatar.

En avril dernier, L’Équipe révélait que Peninsula Capital, un fonds d’investissement basé au Luxembourg, a été perquisitionné en rapport avec l’enquête sur l’attribution du Mondial au Qatar. Ces investigations cherchent notamment à déceler des transactions financières potentielles liées à l’ex-président français, Nicolas Sarkozy. Les recherches initiées en décembre 2019 par le Parquet national financier visaient à élucider si l’attribution du tournoi au Qatar avait été le fruit d’un accord lors du repas à l’Élysée.

Au mois de juin, c’est Michel Platini qui a été entendu dans l’enquête française sur les conditions d’attribution du Mondial 2022, de même que les ex-collaborateurs de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant et Sophie Dion, selon le JDD.

 

 

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