Le biopic « L’Abbé Pierre, une vie de combats », célèbre un héros lyonnais et universel

Le film biographique tant attendu, « L’Abbé Pierre, une vie de combats », est prévu pour illuminer les écrans le 8 novembre. Benjamin Lavernhe, célèbre sociétaire de la Comédie-Française, incarne avec une profondeur remarquable le parcours héroïque de l’Abbé Pierre.

Une performance qui s’annonce déjà comme l’une des plus captivantes de l’année et qui nous permet de revenir sur le destin d’un héros lyonnais et universel.

La performance de Laurent Lafitte a fait l’unanimité et il semblerait que celle de Lavernhe soit du même acabit. La métamorphose de l’acteur en l’icône lyonnaise a nécessité une dévotion sans précédent. Les longues heures passées au maquillage et les efforts pour s’immerger dans le rôle témoignent de l’engagement total de l’acteur. Le processus, parfois exigeant, voyait Lavernhe débuter sa transformation dès deux heures du matin pour parvenir à l’incarnation juste de l’Abbé Pierre âgé de 94 ans, aidé en cela par les prothèses confectionnées par l’atelier CLSFX.

Les coulisses du tournage révèlent des anecdotes fascinantes : entre les séances de maquillage, Lavernhe apprenait son texte ou jouait du piano, et sur le plateau, il luttait contre la chaleur estivale en glissant des pains de glace sous sa soutane. L’acteur a également consacré un temps considérable à la recherche, plongeant dans les archives et s’entretenant avec des proches de l’Abbé Pierre, pour saisir l’essence de ce personnage complexe.

Le réalisateur Frédéric Tellier, connu pour son œuvre « Goliath » de 2022, a sculpté un scénario qui compacte la vie tumultueuse de l’Abbé Pierre en une narration cinématographique de deux heures.

La production du biopic, qui s’est étendue entre la région Rhône-Alpes et l’Île-de-France, a vu le jour grâce à l’initiative du producteur Wassim Béji et de la société SND. Avec un budget conséquent de 15 millions d’euros, le film promet une immersion complète dans la vie de l’un des plus grands militants français. 

Le film est une célébration des innombrables vies que l’Abbé Pierre a vécues, du jeune vicaire méconnu à la star médiatique nationale, en passant par le résistant et le fondateur des communautés Emmaüs. Des instants moins connus de sa vie, tels que son séjour en hôpital psychiatrique et son soutien à des figures controversées, sont également mis en lumière pour présenter un homme aux multiples facettes.

La vie de l’Abbé Pierre

Marie Joseph Henry Grouès, est né le 5 août 1912 à Lyon dans le domicile de ses parents, petite-rue des Gloriettes dans le 4e arrondissement de Lyon, qui se trouve, clin d’oeil de l’Histoire, non loin du square Gustave Ferié, où on squatté de jeunes mineurs isolés durant l’été 2022. Il habiterai ensuite à l’emplacement de l’ancien Collège Maurice Sève, qui a accueilli un squat abritant jusqu’à 400 jeunes migrants. 

Dès son jeune âge, il s’engage dans le service des plus démunis aux côtés de son père. Après une expérience spirituelle profonde à 16 ans, à l’occasion d’un voyage à Rome, il choisit de rejoindre l’ordre des capucins à 17 ans, renonçant à son héritage familial faisant voeu de pauvreté.

Devenu frère Philippe, il se consacre à une vie austère et à l’adoration nocturne. Il est ordonné prêtre en 1938, mais quitte l’ordre pour raison de santé en 1939, devenant vicaire à Grenoble. Durant la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé, mais tombe malade. Plus tard, il s’implique dans la Résistance, sauve des enfants juifs, et aide son frère et d’autres à fuir en Suisse. Il devient aumônier militaire et reçoit la croix de guerre pour son action dans la Résistance.

Après la guerre, l’abbé Pierre entame une carrière politique en tant que député de Meurthe-et-Moselle, affilié initialement au MRP puis à la Gauche indépendante. Il s’implique dans le fédéralisme européen et mondial et s’éloigne du MRP à la suite d’un événement tragique à Brest. Battu aux élections de 1951, il retourne à ses engagements caritatifs et soutient diverses causes sociales, y compris pendant la guerre d’Algérie.

L’abbé Pierre est surtout reconnu pour son dévouement aux pauvres et son rôle dans la fondation d’Emmaüs, un mouvement de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, qui reste son héritage le plus durable.

Il fonde cette organisation laïque en 1949, qu’il nomme ainsi en référence à un village de Judée apparaissant dans un épisode du dernier chapitre de L’Évangile selon Saint Luc. La rencontre avec un certain George, homme désespéré qui a perdu toute raison de vivre, et à qui l’abbé Pierre demande « Viens m’aider à aider », marque le véritable acte fondateur du mouvement. 

Le modèle économique d’Emmaüs, basé sur la récupération et la revente d’objets, permet à la fois de financer l’action du mouvement et de fournir un emploi et un sens à ceux qui en sont privés. Cette initiative s’inscrit dans une logique de développement durable avant l’heure, prônant le recyclage et la réutilisation dans une société de consommation souvent portée au gaspillage.

Sa défaite électorale de 1951 ne fait que renforcer l’engagement de l’abbé Pierre. Privé de ses indemnités de député, il ne se résigne pas et trouve dans la précarité une forme de résilience, s’adaptant et innovant pour maintenir à flot le mouvement qu’il a créé. 

Malgré les difficultés financières initiales, l’abbé Pierre ne se laisse pas abattre et sa participation au jeu Quitte ou double illustre bien son engagement et sa détermination à trouver des moyens pour sa cause. Son appel de 1954, dans un contexte de grand froid meurtrier, montre l’impact de sa parole et de son appel à la solidarité, une solidarité qui s’est manifestée par une générosité exceptionnelle et immédiate de la part de la population. Il rapporte 500 millions de francs dont 2 millions offert par l’acteur américain Charlie Chaplin. « Je ne les donne pas, je les rends. Ils appartiennent au vagabond que j’ai été et que j’ai incarné », a déclaré l’icône du cinéma. 

Après un naufrage en Argentine au cours duquel , il a failli perdre la vie, en 1963, il décide de créer la fondation Emmaüs qui verra le jour en 1971 afin que le mouvement lui survive.

Son héritage perdure bien après sa mort en 2007. Sa vie et son action ont inspiré de nombreux  articles, livre set film. En 1989, le film « Hiver 54, l’abbé Pierre » de Denis Amar revenait sur les évènements de 1954, mettant en scène Claudia Cardinale et Lambert Wilson dans les rôles principaux. « L’Abbé Pierre, une vie de combats », est un nouvel hommage à ce héros lyonnais et universel, dont l’oeuvre est plus que jamais inspirante en cette période de crise social et économique.

Laisser un commentaire