Jamie Dimon prévoit de vendre pour 141 millions de dollars d’actions JPMorgan, un signal préoccupant ?

Jamie Dimon, PDG de JPMorgan Chase & Co., la première entreprise mondial selon le Classement Forbes Global 2000, qui est affiliée au Forum économique mondial, envisage de céder environ 141 millions de dollars d’actions de la banque, selon Bloomberg, une première depuis ses 18 ans à la tête de cette institution de Wall Street. Cette annonce soulève toutefois des interrogations quant à ses implications.

La vente programmée, qui devrait débuter l’année prochaine, concernera environ 1 million d’actions. Elle vise une diversification financière et une optimisation fiscale. Bien que Dimon réaffirme sa confiance dans les perspectives de l’entreprise, avec une participation toujours substantielle dans la banque, selon un communiqué de la banque, cette démarche interroge. En effet, la famille Dimon détient actuellement quelque 8,6 millions d’actions de JPMorgan, et cette transaction représenterait moins de 12 % de leur portefeuille dans l’entreprise new-yorkaise.

Jamie Dimon pessimiste concernant l’Économie mondiale

L’analyste de Wells Fargo & Co., Mike Mayo, a noté que le plan de vente d’actions de Dimon « vient après ses commentaires pessimistes qui incluent la possibilité que les taux d’intérêt augmentent jusqu’à 7 %, et un secteur bancaire ‘non investissable’ en raison du fardeau des exigences proposées par Basel III Endgame ».

Bâle III est un accord international qui établit des normes pour les fonds propres, la résistance aux chocs financiers, et les exigences de liquidité des banques. Mis en place pour corriger les failles de réglementation financière mises en lumière par la crise financière de 2007-2008, cet accord renforce les exigences en capital pour les banques, insiste sur la détention d’actifs liquides de qualité et vise à limiter l’endettement bancaire. Il a été initié par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, un forum où sont traités quatre fois par an les sujets relatifs à la supervision bancaire, qui est hébergé à Bâle par la Banque des règlements internatinonaux (BRI), que l’on surnomme parfois la « banque des banques centrales ».

Dimon critique les nouvelles règles des régulateurs américains

Au mois de septembre, lors d’une conférence à New York, Jamie Dimon, a critiqué les règles plus strictes en matière de capital proposées par les régulateurs américains dans le cadre de Basel III, déclarant aux investisseurs qu’elles pourraient inciter les prêteurs à se retirer et freiner la croissance économique. « Je ne serais pas un grand acheteur de banque », a-t-il déclaré .

Sur le plan mondial, Dimon a partagé ses vues sur la Chine, estimant que le marché n’y est plus aussi profitable. Après une visite en Chine en mai, sa première en quatre ans, il est devenu nettement plus prudent.

Aux États-Unis, malgré la solidité du secteur de la consommation et bancaire, Dimon adopte une position plus réservée vis-à-vis de l’environnement économique actuel.

« Il est erroné de se fier uniquement aux données actuelles sans tenir compte de l’avenir. Et cet avenir est marqué par le resserrement quantitatif. Les dépenses excessives mondiales, la guerre en Ukraine persistante sont des facteurs clés », a-t-il expliqué, ajoutant qu’il serait illusoire de croire à une prospérité économique continue sur le long terme.

Il a rappelé que le resserrement quantitatif inverse la tendance des achats massifs d’actifs par les banques centrales, une mesure de soutien adoptée durant la crise du coronavirus en 2020 et la crise financière mondiale d’il y a 15 ans.

Dimon a conclu en signalant que les effets du retrait des mesures de relance fiscale se manifesteraient probablement plus nettement dans les 12 à 18 prochains mois.

Le grand gagnant du Krach de 2008

Jamie Dimon est actuellement le doyen des PDG parmi les grandes banques américaines. Il est en effet l’un des seuls à avoir survécu au Krach de 2008. Contrairement à beaucoup de ses pairs, il est sorti de cette période difficile encore plus fort. Il a habilement évité la crise des subprimes en se débarrassant de ces actifs toxiques juste à temps. Sans hésiter, il a également bloqué les actifs de Lehman Brothers, accélérant potentiellement leur faillite. En conséquence, sous sa direction, JPMorgan Chase a non seulement survécu, mais a également joué un rôle dans le sauvetage du système bancaire américain. À la demande du gouvernement, la banque a acquis les institutions financières en difficulté Bear Stearns et Washington Mutual à des prix très bas, bénéficiant de surcroît de la garantie du Trésor américain. Ce mouvement était notable à une époque où d’autres banques hésitaient à accepter de l’aide gouvernementale, de peur de nuire à leur réputation.

Au printemps dernier, Jamie Dimon a été de nouveau appelé d’urgence par la secrétaire du Trésor, Janet Yellen, une habituée de Davos, pour sauver la First Republic Bank, dont les actions avaient chuté drastiquement à la suite de la faillite de la Silicon Valley Bank.

Du 9 au 15 mars, la Fed a injecté environ 164,8 milliards de dollars dans le système bancaire américain, un montant supérieur à son record de 111 milliards de dollars établi lors de la crise des subprimes en 2008. Cette injection de liquidités a bénéficié à divers actifs à haut risque, y compris les valeurs technologiques et le Bitcoin.

La décision de Dimon de vendre une partie substantielle de ses actions JPMorgan, tout en restant un acteur clé dans le secteur, suscite donc des interrogations sur les perspectives économiques à venir et les stratégies d’investissement des acteurs majeurs du secteur bancaire.

Cette inquiétude se répercute dans d’autres sphères financières. Elon Musk, lors de la présentation des résultats de Tesla, s’est aussi alarmé des effets des taux d’intérêt croissants sur ses ventes. Bruno Le Maire, acteur clé de l’agenda 2030, a lui aussi exprimé des doutes sur l’économie mondiale. Ces éléments contribuent à dessiner un paysage financier incertain, où même les figures comme Dimon, loué pour avoir stabilisé le système bancaire américain post-2008, cherchent à se protéger.

Par Grégory Fiori

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